par Raquel Castillo et Julien Toyer
MADRID (Reuters) - Le procureur de l'Etat espagnol a requis jeudi un mandat d'arrêt européen contre Carles Puigdemont et le placement en détention provisoire de huit des neuf dirigeants séparatistes entendus par une juge de l'Audience nationale, la Haute Cour de justice espagnole, à Madrid, où ils doivent répondre d'accusations de rébellion, sédition et détournement de fonds publics.
Il a demandé une mesure de libération sous caution de 50.000 euros pour le neuvième, Santi Vila, qui a démissionné de l'exécutif régional de Catalogne avant le vote de la déclaration unilatérale d'indépendance et milite depuis pour une solution négociée avec le gouvernement.
Comme annoncé, Carles Puigdemont, le président destitué de l'exécutif régional qui a gagné Bruxelles en début de semaine, n'a pas répondu à la convocation mais a fait savoir par son avocat belge qu'il se tenait prêt à témoigner depuis la Belgique.
Quatre autres conseillers de l'exécutif destitué de Catalogne ne se sont pas présentés non plus devant la juge Carmen Lamela.
Le président du Tribunal suprême, Carlos Lesmes, avait estimé jeudi matin que Puigdemont fasse l'objet d'un mandat d'arrêt européen s'il refuse de se présenter devant les juges.
Le procureur de l'Etat espagnol est également de cet avis et a demandé au juge de lancer ce mandat d'arrêt européen contre l'ancien président catalan.
Dans ce cas, il sera pratiquement impossible à Carles Puigdemont de se présenter aux élections régionales du 21 décembre.
La présidente du parlement régional, Carme Forcadell, et cinq autres députés qui siégeaient au bureau de l'assemblée catalane ont été entendus eux par le Tribunal suprême, qui a accepté leur demande de report de l'audition au 9 novembre, le temps qu'ils puissent se préparer.
MANIFESTATIONS À BARCELONE
Leurs cas sont examinés par le Tribunal suprême du fait de l'immunité parlementaire dont ils bénéficient.
Le gouvernement et le parlement de la région ont été dissous vendredi dernier par le gouvernement espagnol dans les heures ayant suivi l'adoption de la déclaration unilatérale d'indépendance de la Catalogne.
"Ce n'est pas avec des tribunaux et de la violence qu'on réglera le conflit catalan, mais par de la politique et du leadership", a déclaré l'ex-président de la Generalitat Artur Mas, qui accompagnait les dirigeants catalans à leur arrivée à l'Audience nationale.
Ces premières audiences doivent déterminer s'il y a lieu d'engager des procédures judiciaires en bonne et due forme susceptibles de durer plusieurs années et d'aboutir potentiellement à des procès.
Lors d'une conférence de presse organisée mardi à Bruxelles, Carles Puigdemont a affirmé qu'il ne demanderait pas l'asile politique à la Belgique et qu'il ne tenterait pas de se soustraire à la justice espagnole, mais a réclamé des "garanties judiciaires", non spécifiées, pour rentrer en Espagne et répondre à la convocation des juges.
Son avocat belge a redit jeudi que Puigdemont coopérerait avec les justices espagnole et belge.
"Le climat n'est pas bon, il vaut mieux prendre quelques distances", a dit Paul Bekaert à Reuters "S'ils le demandent, il coopérera avec les tribunaux espagnols et belges", a-t-il ajouté.
Des manifestations ont été organisées jeudi dans le centre de Barcelone en solidarité avec les dirigeants sécessionnistes.
Des fissures sont cependant apparues au sein de la coalition indépendantiste, où des voix s'élèvent en faveur d'un règlement négocié avec Madrid.
(avec Clément Rossignol à Bruxelles; Henri-Pierre André et Guy Kerivel pour le service français)