PARIS (Reuters) - "Le syndicalisme est mortel", prévient le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, dans une mise garde lancée aux organisations syndicales contre le risque d'éclatement qu'ont vécu les partis politiques traditionnels en France.
"Je suis persuadé que le syndicalisme est mortel. Ce qu'il s'est passé pour les partis politiques traditionnels peut arriver aux syndicats", dit-il dans une interview publiée vendredi par Libération.
"Ce sera à nous de montrer que l'on est incontournables. Si on veut continuer à tenir notre place, il faudra être capable d'être fins et d'aller sur les bons sujets", a-t-il ajouté.
Les syndicats, qui ont tous affiché leur déception face à la réforme désormais adoptée du Code du travail, ne parviennent pas à s'entendre sur une ligne de conduite commune pour faire face au gouvernement.
La CGT et Force ouvrière, favorables à la mobilisation dans la rue, ont décidé de tenir une nouvelle journée de manifestations le 16 novembre prochain contre la politique sociale d'Emmanuel Macron qu'elles jugent trop libérale.
La CFDT, l'UNSA et la CFTC refusent encore de se joindre au mouvement de contestation, préférant envoyer une mise en garde au gouvernement sur les réformes à venir de l'apprentissage, la formation professionnelle et de l'assurance chômage.
Laurent Berger estime que descendre dans la rue à ce stade envoie un mauvais signe.
"Le vrai aveu de faiblesse, c'est d'aller dans la rue sans salariés, juste avec des militants et sans pouvoir peser sur le contenu", a-t-il dit au quotidien. "Je l'assume, je ne voulais pas une démonstration de faiblesse sur les ordonnances. Je ne voulais pas faire ce cadeau au gouvernement."
Les trois journées de manifestations organisées par la CGT et Solidaires, les 12 septembre, 23 septembre et 19 octobre ont affiché une mobilisation déclinante. Le mouvement de contestation est passé de 223.000 personnes le 12 septembre à seulement 37.700 le 19 octobre, selon la police.
"Je ne critique pas les autres options syndicales, mais on a intérêt à garder notre capacité de mobilisation pour d'autres moments", a dit Laurent Berger. "Ce qui fait la force d'une organisation syndicale, c'est sa présence sur le terrain auprès des salariés et sa capacité à construire des propositions et des contre-propositions".
"Toute autre force qui serait seulement de témoignage, sans pouvoir imposer un certain nombre de choses se retrouvera reléguée", a-t-il précisé.
Le syndicaliste a par ailleurs indiqué qu'il comptait bien se représenter lors du congrès de la CFDT en juin prochain.
"La durée moyenne à la tête de la CFDT, c'est une dizaine d'années. J'en serai à cinq, donc oui, je me représente", a-t-il dit au Parisien. "Je crois pouvoir encore apporter à nos combats".
(Caroline Pailliez, édité par Yves Clarisse)