PARIS (Reuters) - Les Républicains ont de nouveau voté mardi l'exclusion des ministres issus de leurs rangs et de deux députés lors d'un bureau politique censé mettre un point final à un feuilleton à rebondissements long de plusieurs mois.
Les dirigeants du parti s'étaient déjà prononcés en ce sens il y a une semaine avant de se rendre compte que le quorum n'était pas atteint pour que la radiation de Gérald Darmanin, Sébastien Lecornu, Thierry Solère et Franck Riester soit statutairement valide.
Cette fois-ci, une trentaine de cadres, dont Gérard Larcher, Christian Jacob, Laurent Wauquiez et Eric Ciotti, se sont rendus au bureau politique lors duquel une majorité simple était nécessaire, a-t-on appris auprès d'un participant.
Plusieurs figures majeures de la droite, comme Valérie Pécresse ou Xavier Bertrand, n'ont pas fait le déplacement - en théorie, 132 personnes étaient convoquées.
"C'était une réunion purement formelle", a dit à Reuters le secrétaire général du parti, Bernard Accoyer, pour expliquer le petit nombre de présents.
"Maintenant, on passe à autre chose", a-t-il ajouté. "Nous sommes dans les ateliers de la refondation et dans la préparation du congrès de décembre" lors duquel le futur président de LR sera intronisé.
Le cas du Premier ministre, Edouard Philippe, n'a pas fait l'objet d'un vote puisque le parti avait déjà "pris acte" de son départ la semaine dernière.
Les discussions parfois houleuses sur l'opportunité de sanctionner les réprouvés témoignent des débats plus profonds qui travaillent LR depuis l'élection d'Emmanuel Macron, certains comme Nadine Morano qualifiant les partants de "traîtres", d'autres les voyant comme les serviteurs d'une politique authentiquement de droite.
"PAS FRANCHEMENT ENVIE DE SE BATTRE"
"Le parti Les Républicains fait ce soir honte aux valeurs du gaullisme et du rassemblement", a réagi le maire de Nice, Christian Estrosi, sur Twitter. "Pauvre démonstration de force pour un parti qui en manque si cruellement."
L'imbroglio a commencé en mai, lorsque des figures issues de plusieurs familles de LR, un "juppéiste" (Edouard Philippe), un proche de Xavier Bertrand brièvement passé par la "Sarkozie" (Gérald Darmanin) et un ex-candidat à la primaire de 2016 (Bruno Le Maire), ont rejoint un gouvernement composé par Emmanuel Macron dans le but, entre autres, de fracturer la droite.
Puis, dans la foulée des législatives de juin, une dizaine de députés LR ont fait sécession sous la houlette de Thierry Solère et Franck Riester pour créer un nouveau groupe parlementaire, les Constructifs, avec l'appoint de l'UDI.
Pour Franck Riester la décision du bureau politique est "une purge politique".
"Laurent Wauquiez et un certain nombre de personnes qui se sont mises à son service ne veulent pas qu'il y ait une tête qui dépasse", a-t-il dit sur franceinfo. "Il veut un parti propre, un parti qui a simplement des affidés et qui défend une ligne identitaire autoritaire."
Le député assure qu'il ne va pas "laisser la droite républicaine uniquement entre les mains de ces quelques personnes", et réfléchit "très sérieusement" à créer un nouveau parti de "droite modérée" sur "la ligne historique de l'UMP".
Il précise que ce parti travaillera "en partenariat" avec les centristes qui le souhaiteront.
La procédure disciplinaire, engagée en juillet, s'est étalée sur plus de trois mois, afin de ne pas parasiter la campagne des sénatoriales et de laisser aux dissidents l'occasion de s'expliquer devant une commission ad-hoc.
Les responsables LR n'ont pas perdu espoir de faire revenir les membres du groupe constructif, hors meneurs, qui disposent donc d'un délai supplémentaire - au moins jusqu'à la fin novembre - et pas encore assorti de menaces claires.
Plusieurs choix s'offrent désormais aux bannis : fonder un nouveau parti, trouver refuge dans une structure existante, comme l'a déjà fait Bruno le Maire en prenant la carte de La République en marche (LREM), ou garder leur indépendance.
Sébastien Lecornu laisse par ailleurs planer la menace d'un recours interne, voire devant les tribunaux même si, a-t-il dit mardi sur Radio Classique, il n'a "pas franchement envie de se battre pour rester" dans un parti dont le droitier Laurent Wauquiez, favori de l'élection interne, pourrait prendre la présidence.
"Il feront ce qu'ils voudront. Ils continuent à essayer d'exister avec les polémiques qu'ils entretiennent", estime Bernard Accoyer.
(Simon Carraud, édité par Yann Le Guernigou)