PARIS (Reuters) - L'opposition de gauche a continué mercredi à mettre en cause la politique de maintien de l'ordre du gouvernement et l'action de la police à Nantes le soir de la Fête de la musique, quand Steve Maïa Caniço est tombé dans la Loire.
Le corps de l'animateur scolaire âgé de 24 ans a été identifié mardi après avoir été retrouvé la veille dans le fleuve, à quelques centaines de mètres du quai où il avait disparu, théâtre d'une opération de police controversée.
Après La France insoumise mardi, le premier secrétaire du Parti socialiste a demandé mercredi une commission d'enquête parlementaire pour examiner une doctrine de maintien de l'ordre qu'il juge trop violente, évoquant les nombreux blessés du mouvement des Gilets jaunes, l'intervention à Nantes ou encore des brutalités contre des manifestants écologistes à Paris.
"Il y a aujourd'hui un problème à l'échelle de l'exécutif, qui est de dire comment dans ce pays on maintient l’ordre", a dit Olivier Faure sur RMC et BFMTV. "Je demande à ce que la responsabilité soit pointée et que derrière il y ait une évolution".
Le Premier ministre, Edouard Philippe, a assuré que "le ministre de l’Intérieur n’est pas fragilisé", à l'occasion d'un déplacement dans l'Essonne au côté de Christophe Castaner.
"J’ai pleinement confiance en lui", a ajouté le chef du gouvernement. "Nous sommes mobilisés, à la tâche, pour n’accuser personne et ne dédouaner personne. Ce que nous souhaitons, c’est que la transparence soit faite, que les faits soient établis et que les responsabilités soient tirées."
Malgré les conclusions du rapport de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) sur cette intervention dévoilées mardi, Olivier Faure a estimé que "la disproportion qu’il y a eu à Nantes le soir de la Fête de la musique est manifeste".
Selon l'IGPN, l'usage de la force, avec des lancers de grenades et des tirs de lanceur de balle de défense (LBD) face à une foule qui avait jeté de nombreux projectiles en direction des policiers, blessant cinq d'entre eux, "était justifié et n'est pas apparu disproportionné" et "aucun élément ne (permet) d'établir un lien direct entre l'intervention des forces de l'ordre et la disparition de Steve Maïa Caniço".
Quatorze personnes avaient été repêchées dans la Loire, après que les policiers avaient fait usage de gaz lacrymogène pour interrompre un concert de musique électronique, au bord du fleuve. La musique devait être coupée à 04h00 et l'un des DJs n'avait pas respecté cet horaire.
CASTANER CRITIQUÉ
Selon Sandra Regol, porte-parole d’Europe Ecologie-Les Verts, déclarer que le décès du jeune homme n'a rien à voir avec l’intervention de la police traduit de la part du gouvernement "un certain mépris, une certaine violence".
"Ce gouvernement a une responsabilité, c’est Christophe Castaner qui demande à sa police, qui lui met la pression pour avoir des chiffres", a-t-elle déclaré sur RTL (DE:RRTL).
Mardi, le procureur de la République de Nantes a annoncé l'ouverture d'une information judiciaire "contre X" pour "homicide involontaire".
Edouard Philippe a quant à lui annoncé qu'il saisissait l'Inspection générale de l'administration (IGA), estimant que "le déroulement de cette soirée, l'enchaînement des faits restent confus".
Le chef du gouvernement a ainsi évoqué les conditions dans lesquelles des sonos avaient pu être placées sur des quais dépourvus de barrière et s'est demandé si les mesures préventives étaient adaptées et proportionnées et si les autorités de police disposaient "d'une conduite à tenir suffisamment claire".
A Nantes, ces interrogations ont été perçues comme une tentative de diversion pour alléger la pression sur le ministre de l'Intérieur en jetant le doute sur l'action de la mairie.
"Christophe Castaner essaye de détourner le sujet, il y a des installations à cet endroit depuis 20 ans (...) la seule question qui est posée est celle de l’intervention policière et Christophe Castaner ferait mieux de prendre ses responsabilités et de rendre des comptes sur la politique de maintien de l’ordre qu’il conduit au nom du président Macron", a déclaré Aymeric Seassau, adjoint PCF à la mairie, sur BFMTV.
Les conclusions de l'IGA sont attendues dans un mois et seront rendues publiques, a précisé Edouard Philippe.
(Jean-Baptiste Vey, édité par Yann Le Guernigou)