par Marine Pennetier et Elizabeth Pineau
PARIS (Reuters) - Emmanuel Macron s'exprimera lundi devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles, à la veille de la déclaration de politique générale de son Premier ministre Edouard Philippe, afin de présenter les grandes orientations de son mandat.
Le président de la République, qui a reçu mercredi Gérard Larcher, président du Sénat, et François de Rugy, président de l'Assemblée nationale, "les a informés de sa décision de convoquer le Parlement réuni en Congrès le lundi 3 juillet à 15h afin de présenter à la représentation nationale les grandes orientations de son mandat", annonce l'Elysée dans un communiqué.
Emmanuel Macron, dont le discours devrait être "ramassé", ne rentrera pas dans les détails de la feuille de route des ministres, contrairement au chef du gouvernement, précise-t-on dans l'entourage du chef de l'Etat en réponse aux critiques sur le télescopage de ces deux interventions. "Les discours seront co-construits et complémentaires".
Interrogé à ce sujet lors d'un déplacement à Tallinn, en Estonie, Edouard Philippe a répondu : "Comme toujours, il y aura deux expressions à la fois parfaitement en ligne et complémentaires".
Selon l'entourage du chef de l'Etat, le discours de Versailles donnera au président l'occasion "d'expliquer dans quel monde on vit, ce que sont les défis d'un pays au début du 21e siècle, le fonctionnement de nos institutions".
Emmanuel Macron "avait pris l'engagement que l'exécutif soit en capacité de rendre des comptes et donc une fois par an de s'exprimer devant le Parlement réuni en congrès", rappelle-t-on.
"François Hollande ne l'avait pas fait en début de mandat, c'est quelque chose qui a manqué. Il faut dire à ceux qui l'ont élu, qui lui ont fait confiance, ce que vous allez faire pour le pays, où on en est", ajoute-t-on, dix jours après le second tour des élections législatives marqué par un fort taux d'abstention.
"AMÉRICANISATION DE LA VIE POLITIQUE"
Le discours d'Emmanuel Macron, qui sera rédigé par sa "plume" Sylvain Fort, s'inscrit dans une séquence nationale et internationale chargée incluant le G20 à Hambourg les 7 et 8 juillet, le conseil franco-allemand du 13 juillet à Paris et le traditionnel défilé du 14-Juillet, fête nationale, en présence du président américain Donald Trump.
Depuis la réforme constitutionnelle de 2008 voulue par Nicolas Sarkozy, le président français peut s'adresser aux parlementaires à Versailles, ce qui était impossible avant.
La dernière convocation du Parlement dans ce format remonte au lendemain des attentats du 13 novembre 2015 qui avait fait 130 morts à Paris et au Stade de France.
François Hollande y avait annoncé son souhait d'étendre la déchéance de nationalité aux binationaux "nés Français" en cas de terrorisme, une mesure abandonnée par la suite.
La perspective de ce double discours en l'espace de 24 heures a suscité l'ironie d'une partie de la classe politique, interrogée par la presse à l'Assemblée nationale.
Pour le député Les Républicains Eric Ciotti, la décision d'Emmanuel Macron prouve qu'Edouard Philippe "n'a aucune responsabilité : c'est finalement une marionnette sans voix".
Alexis Corbière, élu de la France insoumise, voit dans ce discours à venir "une manifestation de cette présidence monarchique, jupitérienne" représentée par Emmanuel Macron.
"Il faut arrêter cette infantilisation du citoyen en concentrant autant de pouvoir sur un seul homme", a-t-il ajouté, évoquant "une forme de boursouflure de cette ultraprésidence, une forme d'omnipotence qui s'exprime, une forme d'américanisation de la vie politique, un discours à la Nation".
Pour Olivier Faure, député socialiste à la tête du groupe Nouvelle gauche, "le président cherche à contourner son propre gouvernement et à prendre les devants avec un Premier ministre qui sera condamné à simplement répéter devant l'Assemblée ce que le président aura dit la veille devant le Congrès."
Thierry Solère, député LR "constructif", est plus positif.
"L'idée qu'une fois par an le président de la République vienne s'exprimer devant la représentation nationale me paraît simple, transparente, moderne", a-t-il estimé.
Bien que membre du même groupe, le centriste Jean-Christophe Lagarde a fait savoir qu'il n'irait pas au Congrès. "1)c'est inutile et coûte cher 2)ça rabaisse le Gouvt 3)le PR n'a pas besoin de nous pour sa com", a-t-il écrit sur Twitter.
(Avec Jean-Baptiste Vey, Michel Rose et Emile Picy, édité par Yves Clarisse)