PARIS (Reuters) - Michel Platini réaffirme que le versement de deux millions de francs suisses (1,8 million d'euros) reçu de la FIFA en 2011 a rémunéré un travail réel et avait été convenu oralement avec Sepp Blatter lors d'un échange relaté dans Le Monde par le président de l'UEFA.
L'ancien capitaine de l'équipe de France, candidat déclaré à la présidence de la fédération internationale de football, a été suspendu 90 jours par la commission d'éthique de la FIFA en raison de doutes sur la légalité de ce versement.
Dans un entretien publié lundi sur le site internet du Monde, Michel Platini assure qu'il brigue toujours la présidence de la FIFA malgré les accusations qui lui valent un statut "entre celui de témoin et d'accusé" devant la justice suisse, et le risque que sa candidature ne soit pas validée.
"Ce qui m'énerve le plus, c'est d'être mis dans le même sac que les autres. Je trouve honteux d'être traîné dans la boue", dit l'ancien meneur de jeu, suspendu au même titre que le président démissionnaire Sepp Blatter ou le secrétaire général de la FIFA Jérôme Valcke, visés par des enquêtes sur des faits de corruption présumée.
Interrogé sur les conditions du versement suspect, Michel Platini raconte avoir été sollicité en 1998 par Sepp Blatter, sur le point d'être élu à la FIFA, pour être son "conseiller".
L'ex-sélectionneur des Bleus dit avoir donné son accord et rapporte la suite de leur conversation : "'Combien tu veux ?', demande Blatter. Je réponds : 'Un million.' 'De quoi ?' 'De ce que tu veux, des roubles, des livres, des dollars.' A cette époque, il n'y a pas encore l'euro. Il répond : 'D'accord, un million de francs suisses par an.'"
"UN TRUC D'HOMME À HOMME"
Michel Platini explique ne pas être "un homme d'argent" et avoir demandé un million sans préciser de devise pour dire à Sepp Blatter de "choisir" ce qu'il voulait lui donner.
"C'était un truc d'homme à homme. Il allait devenir président de la FIFA. La FIFA! J'avais confiance. De toute manière, j'ai appris depuis qu'en droit suisse, un contrat oral vaut comme un contrat écrit", dit Michel Platini.
Le versement est jugé suspect parce qu'il est intervenu en 2011, pour un travail réalisé entre 1998 et 2002, que l'ancien numéro 10 de la Juventus Turin dit avoir été consacré à la réforme du calendrier mondial ou au projet "Goal" au bénéfice des pays les plus pauvres, notamment.
Interrogé sur le délai entre sa mission et le paiement, Michel Platini dit être allé, après quelques mois, demander à Sepp Blatter s'il avait "un problème pour (le) payer".
"Il me dit : 'Oui. Je ne peux pas te payer un million à cause de la grille des salaires. Tu comprends, le secrétaire général gagne 300.000 francs suisses. Tu ne peux avoir plus de trois fois son salaire. Alors on va te faire un contrat pour 300.000 francs suisses et on te donnera le solde plus tard.'", rapporte Michel Platini.
"C'est ce qui s'est passé. Seulement, le plus tard n'est jamais venu", ajoute-t-il, assurant n'avoir pas demandé le solde en 2002, à la fin de sa mission.
"Mais j'aurais mieux fait de demander une reconnaissance de dette", reconnaît l'ex-joueur qui demande en 2011 à ses services de vérifier auprès de Sepp Blatter s'il lui doit de l'argent.
"Et il a dit oui. J'ai envoyé une facture à leur demande (...) J'ai été payé dix jours plus tard sans que la FIFA fasse aucune difficulté et j'ai moi-même payé des charges et des impôts sur cette somme", dit-il. "Franchement, s'il y avait eu un doute quelconque, la FIFA aurait refusé de me payer", insiste Michel Platini.
Michel Platini a fait appel de sa suspension et, malgré l'appui de l'UEFA, a vu le front européen se fissurer avec le retrait du soutien des Anglais. L'élection du successeur de Sepp Blatter est pour l'instant prévue le 26 février.
(Gregory Blachier, édité par Yves Clarisse)