Alors que près de deux semaines se sont écoulées depuis l’élection américaine, la résolution du précipice fiscal (fiscal cliff) est le sujet de nombreuses analyses tant au sud de la frontière qu’au Canada. Différents facteurs doivent être considérés afin de déterminer les différents scénarios possibles et les implications pour le marché. D’abord, soulignons que la situation fiscale américaine, quoiqu’inquiétante, est quand même moins problématique que pour la majorité des pays européens. En effet, bien que le niveau des dettes publiques soit comparable, le pourcentage des revenus de l’État (en provenance des impôts et taxes) est nettement inférieur aux É.-U. (24 % du PIB) qu’en Europe (entre 40 et 50 % du PIB). Même s’il y a beaucoup d’opposition à des augmentations d’impôts, la marge de manœuvre du gouvernement américain est donc plus considérable. On peut imaginer, par exemple, que l’introduction d’une taxe à la consommation (TVA) de 5 % pourrait résoudre le problème de déficit annuel. Par ailleurs, l’importante polarisation des votes selon la tranche de revenus alors qu’Obama a obtenu une majorité confortable chez les citoyens gagnant moins de $35 000 et que Romney dominait pour les tranches de revenus plus élevés, laissent entrevoir des discussions animées au congrès. Le relèvement anticipé des taux d’imposition des gains en capital et du taux d’imposition des dividendes, qui affectent davantage les gens fortunés, pèsent lourd sur les marchés boursiers américains et contribuent à la vigueur retrouvée du USD depuis 2 semaines.
Les élus doivent donc intervenir afin de réduire le précipice fiscal qui menace la croissance économique, tout en élaborant un programme crédible de réduction du déficit à moyen terme. À 6 semaines de la fin de l’année et du déclenchement automatique des mesures de réduction du déficit, il est improbable que des mesures de grandes envergures soient votées. Ainsi, doit-on se demander quel genre d’entente et quel genre de discours des élus américains permettront de rassurer les marchés? Chaque parole, chaque geste seront scrutés à la loupe. Pendant ce temps, la menace d’une décote américaine continuera de peser sur
les marchés boursiers. Rappelons que la décote américaine de l’été 2011 par Moody’s avait favorisé une appréciation de la devise américaine. Encore une fois, la performance des marchés financiers se retrouve entre les mains des politiciens : une situation pour le moins inquiétante.
Guy Desrochers