Fragilisée par des turbulences politiques majeures, la livre turque a touché la semaine passée de nouveaux plus bas historiques face aux principales devises que sont l’euro et le dollar.
Il faut dire que c’est quasiment sans discontinuer que la livre se déprécie, abandonnant depuis le 1er janvier plus de 9% face à l’euro, après en avoir déjà perdu plus de dix l’année passée.
Paradoxalement, le record de faiblesse de la devise observé vendredi coïncidait avec le moment où Standard & Poor’s relevait de « négative » à « stable » la perspective de la note « BB+ » de la Turquie.
Dans sa note justificative, Standard & Poor’s salue les réformes entreprises par le gouvernement en vue de "sevrer l'économie turque de sa dépendance au financement étranger", comprenez par là en levant une grosse partie de ses financements dans la devise locale.
Au passage, l'agence a revu légèrement à la baisse à 3,20% ses prévisions de croissance pour 2016 et 2017, bien qu'elle considère comme dynamique positive le vote cet été d'une loi obligeant les salariés de moins de 45 ans à cotiser pour leur retraite dès 2017.
Et Standard & Poor’s d’ajouter que d'autres réformes sont attendues, notamment concernant la réduction de la facture énergétique du pays, source importante de déficit budgétaire, précise-t-elle.
Incertitudes politiques
Si la livre est impactée par ces perspectives de croissance plutôt mollassonnes pour un pays émergent, c’est avant tout les conséquences politiques de la tentative de coup d’Etat manqué de juillet qui suscitent l’inquiétude des analystes.
Fin septembre, Moody's dégradait dans ce sens la note souveraine de la Turquie dans la catégorie spéculative, jugeant l'économie très exposée au retrait des investisseurs en raison des inquiétudes politiques. Des inquiétudes renforcées ces dernières semaines après que le gouvernement ne soit passé à l'offensive pour concrétiser son projet de réforme constitutionnelle, visant à renforcer les pouvoirs du président Recep Tayyip Erdogan.
Suite à l’arrestation vendredi par les autorités turques de neuf députés du Parti pro-kurde HDP, dont ses deux co-présidents, la devise plongeait de 1,75% à 3,50 livres pour un euro, un niveau plus bas encore que celui observé au lendemain du putsch manqué de juillet.
Plus de 9% de rendement en livre turque
L’investisseur prêt à prendre le pari d’une remontée de la livre peut tabler sur un rendement annuel supérieur à 9% en se positionnant sur l’obligation notée AAA de la Banque européenne d’investissement. Cette obligation, remboursable en 2019 au coupon de 8,50%, se traite actuellement sous le pair à un prix indicatif de 98,75% du nominal.