Après avoir été éclipsée par les négociations sur le Brexit ces derniers jours, la question du budget italien semble de nouveau occuper le premier rang dans les inquiétudes actuelles du marché, alors que se profile un véritable bras de fer entre l’UE, qui souhaite un budget plus strict, et le gouvernement populiste italien, qui souhaite appliquer un destiné à soutenir la croissance selon lui.
Le taux italien à 10 ans a en effet marqué un pic à 3.783% ce vendredi matin, au plus haut depuis février 2014. De son côté, le spread de taux à 10 ans Italie-Allemagne bat lui aussi des records, avec un sommet à 338.4 points de base ce matin, au plus haut depuis septembre 2013.
Hier, le Premier Ministre Conte a échoué à convaincre ses partenaires européens du bien-fondé des projets de budget de l’Italie, lors de conversations en tête à tête avec le président français Emmanuel Macron, la chancelière allemande Angela Merkel, et le premier ministre néerlandais Mark Rutte.
La Commission Européenne a de son côté envoyé une lettre au gouvernement italien, estimant que les projets de dépenses du pays sont excessifs. L’UE a ainsi donné jusqu’à lundi au gouvernement italien pour fournir une explication au sujet de « la déviation évidente et significative » par rapport aux règles de l’UE.
Cela n’augure rien de bon pour la décision officielle de l’UE qui sera rendue la semaine prochaine. Un rejet du budget par l’UE serait accompagné d’une demande de révision.
Cependant, les premiers ministres délégués et leaders des partis formant la coalition populiste au pouvoir en Italie, Matteo Salvini et Luigi Di Maio, ont déjà fait savoir qu’ils excluent de modifier leur proposition de budget, désireux de remplir leurs ambitieuses promesses électorales (revenu citoyen, baisses d’impôts et abaissement de l’âge de la retraite notamment).
Si l’Italie tient tête, le conflit avec l’UE risque de s’aggraver. Bruxelles n’a aucun pouvoir concret sur les budgets nationaux, mais les gouvernements cherchent généralement à éviter les réprimandes, pour ne pas être soumis à la sanction du marché.
Si un pays dépasse les règles de déficit de façon persistante, la Commission Européenne peut enclencher une procédure pour déficit excessif. Cette procédure implique la fixation d’une date limite à laquelle le pays concerné doit avoir réduit ses déficits, sous peine de se voir infliger une sanction pouvant aller jusqu’à 0.2% du PIB.
Mais au-delà de la sanction elle-même, ce qui serait le plus significatif serait la mise en lumière d’un conflit politique fondamentale entre l’UE et l’Italie, ce qui serait à coup sûr durement sanctionné par les marchés, avec à la clé des conséquences difficiles à évaluer pour le pays, alors que le souvenir de la crise grecque est encore frais dans l'esprit des investisseurs...