Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Cela aurait-il quelque chose à voir avec l’interview de James Gorman, le patron de Morgan Stanley (NYSE:MS) mercredi soir qui pronostique une “récession globale” et un risque de mauvaises surprises pour les actionnaires ?
Ou avec Donald Trump qui, après avoir minimisé et brocardé le “virus chinois”, bascule dans le registre de la dramatisation de la situation et; tel un Winston Churchill de pacotille, promet du sang et des larmes en déclarant: “les deux prochaines semaines vont être très douloureuses à cause du Covid-19 “.
Il fait naturellement allusion à l’accroissement spectaculaire du nombre de victimes : la barre des 200 000 personnes contaminées a été franchie mercredi soir aux Etats Unis, dont un gros tiers des cas pour le seul Etat de New York avec 77 000 cas.
New-York n’a pas pris au sérieux la menace alors que le nombre de victimes “du 9/11” (2 975) est aujourd’hui malheureusement dépassé, et ce le sera de façon très spectaculaire d’ici le 15 avril.
Si le maire de New York Andrew Cuomo s’était convaincu que le Président avait délibérément minimisé le danger pour rassurer Wall Street (son unique obsession) , alors il aurait fermé -tout comme les Italiens 1 mois plus tôt- tous les cinémas, salles de spectacles, musées restaurants, transports en commun qui étaient demeurés opérationnels jusqu’à tout récemment).
Les investisseurs se remettent à partager l’anxiété qui se lit sur les visages de rares New-Yorkais qui sont encore présents dans les rues.
Et cela se lisait au niveau des indices mercredi, avec une chute de -4,45% du “S&P 500” vers 2.470 (dans le sillage notamment des banques avec -7% en moyenne et les “utilities” avec -6,2%, malgré leur caractère plus défensif).
Le VIX qui lui est associé s’est tendu de +6,5% à 57, confirmant son incapacité à rétrograder sous les 50.
Le Dow Jones replongeait de -4,5% vers 20 940 après avoir abandonné plus de 1 000 points à 1 minute de clôture.
Le Nasdaq100 chutait de -4,2% vers 7 486 points dans le sillage des GAFA qui accusaient -5% de repli en moyenne (Apple (NASDAQ:AAPL) -5,3%, Alphabet (NASDAQ:GOOGL) -5,1%, Facebook (NASDAQ:FB) -4,3%…).
Plus inquiétant encore, le Russell2000 s’est effondré de -7% vers 1 072 : les investisseurs anticipent de gros dégâts pour les PME américaines, sous-traitantes des grands groupes industriels, ou “jeunes pousses” vulnérables aux retournements de cycle (c’est un carnage dans les secteurs du loisir tourisme, restauration, compagnies aériennes locales)
Les levées de fonds des PME risquent de se multiplier
Malgré tout l’argent injecté par la FED, des foyers de tension émergent dans le secteur des dettes hypothécaires, des dettes “corporate” du secteur énergie.
Il semble y avoir de nouveau le feu puisque la FED annonçait mercredi abaisser ses exigences en matière de solvabilité des banques (réduction des réserves obligatoires).
La compagnie maritime Carnival (LON:CCL) s’effondrait de -33% (entraînant dans son sillage les autres croisiéristes Royal Carribean avec -20%, Norwegian Cruise avec -13%.
Carnival a tenté sans succès de lancer une émission obligataire en Europe ce mercredi, mais a pu placer 4 Md$ d’obligations outre-atlantique. avec un coupon de 11,5%.
Le croisiériste risque de voir sa note “BBB” basculer vers “BB” (« non grade » à « spéculatif ») ces prochains jours : les prêteurs la considèrent comme déjà au bord de la faillite car 12%, ce n’est pas le prix du “BB” mais du pur “Junk”.
Ce genre de cas de figure risque de se multiplier au cours des prochaines semaines et James Gorman (le CEO de Morgan Stanley) s’alarme des appels de la Maison Blanche, des autorités monétaires et des régulateurs de Wall Street à la modération, voire à la suppression des dividendes en 2020.
Il est vrai que renforcer les fonds propres en temps de crise, cela devient vite un exercice compliqué : en 2001, 14% des entreprises n’y sont parvenues et ont fait faillite ; en 2008/2009, le taux défaut n’a pas dépassé 9%.
Cette fois-ci, les experts des marchés de taux estiment que les liquidités pourraient manquer avant mi-avril aux nombreuses petites et moyennes entreprises.
Or sans dividende, les investisseurs qui prennent le bouillon (repli de -20% des indices américains en 5 semaines) ne peuvent même plus espérer un peu de rémunération pour essayer de sauver leur année.