Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je vous souhaite la bienvenue à ce colloque qu’organisent aujourd’hui l’Autorité de contrôle prudentiel et l’Autorité des marchés financiers.
Avant de dire quelques mots sur la problématique qui nous réunit ce matin, je voudrais vous dire combien nous sommes, Jean-Pierre JOUYET et moi-même, attachés à la collaboration fructueuse entre les deux
autorités que nous présidons.
Depuis la création de l’ACP, il y a deux ans, l’ACP et l’AMF ont uni leurs efforts pour renforcer durablement la protection des consommateurs.
Un pôle commun a été institué. Outre la plateforme d’information Assurance Banque Épargne Info Service, qui est de mieux en mieux connue du grand public, de multiples actions en matière de protection
de la clientèle ont également été menées. Ainsi, en 2010, la publication simultanée d’une recommandation de l’ACP et d’une position de l’AMF a permis d’encadrer la commercialisation des produits complexes,
quel que soit le vecteur de distribution. Face aux dérives parfois constatées, ces deux textes ont rappelé la nécessaire intelligibilité des contrats proposés à des particuliers.
En 2011, les contrôles conjoints se sont multipliés. 12 contrôles conjoints ont été effectués dans des entités distribuant des contrats d’assurance-vie et des produits financiers ; les actions communes ont également porté sur les opérateurs proposant des transactions avec effet de levier sur le marché des changes (Forex) et sur le traitement des réclamations dans l'ensemble du secteur financier. En 2012, les contrôles communs seront poursuivis sur les différents acteurs intervenant dans la chaîne de distribution des contrats d'assurance, notamment auprès de sociétés de gestion de portefeuille, d'établissements bancaires et de
plates-formes de distribution.
Ce travail conjoint démontre, s'il en était besoin, la détermination partagée des deux autorités à mettre les intérêts de la clientèle au centre du dispositif de régulation des différents produits financiers.
Certains sujets imposent aux régulateurs de croiser leurs regards. C’est le cas de l’épargne des ménages. Si les marchés financiers sont un des débouchés naturels de cette épargne, les particuliers n’y accèdent, sauf
exception, qu’à travers les services offerts par les établissements financiers et organismes d’assurance.
La crise que nous traversons depuis plus de 4 ans a eu un impact profond sur l’économie de notre pays et du monde, affectant tant les marchés financiers, les banques et les assureurs, que les comportements
d’épargne des ménages. Pour comprendre les changements que la crise a induits et pour agir dans les meilleures conditions, il est nécessaire que l’ACP et l’AMF agissent de concert et soient à l’écoute des points de vue des experts et des praticiens.
Tel est l’objectif du colloque académique de ce matin impliquant les comités scientifiques de l’ACP et de l’AMF, qui jouent un rôle important de conseil dans chacune de nos institutions avec de clairs sujets
d’intérêt commun. Il est organisé autour de thèmes de réflexion concrets dont je souhaiterais maintenant vous dire quelques mots.
I. Tout d’abord, dans un contexte difficile, les ménages français ont fait évoluer leurs choix en matière de placements : quelles conséquences peut-on en tirer ?
Déjà élevé avant la crise, le taux d’épargne des ménages français s’est encore accru, atteignant des valeurs proches de celles du début des années 1980. Cette hausse du taux d’épargne semble s’inscrire dans une démarche de précaution.
L'année 2011 a été aussi marquée par une réallocation entre les différents placements financiers. Face aux
importants retraits sur les OPCVM et à la baisse de la collecte nette de l'assurance-vie –mouvement qui s’est toutefois atténué depuis le début de l’année 2012–, les produits bancaires ont enregistré une
progression sensible. Les épargnants ont ainsi privilégié des produits bancaires plus liquides et moins risqués, tels que les livrets, au détriment des investissements de long terme, pourtant nécessaires pour
couvrir certains besoins des ménages et de l’économie.
Ces mouvements peuvent s’expliquer par plusieurs facteurs: aversion au risque, préférence pour la liquidité, resserrement des écarts de taux de rémunération, incertitude sur le régime fiscal, «réintermédiation» de l'épargne en vue des nouvelles règles prudentielles (Bâle 3 et Solvabilité 2). Je soulignerais l’importance de la complémentarité des approches qui vous seront présentées dans cette première session. Si l’épargne soulève des enjeux macroéconomiques bien connus, ce sont les décisions individuelles des ménages et de leurs fournisseurs de services financiers qui « in fine » en expliquent les fondamentaux.
II. Ensuite, quels enjeux les mouvements de l’épargne des ménages posent-ils en matière de commercialisation des produits financiers ?
Les règles de commercialisation des produits financiers jouent un rôle fondamental dans les économies modernes car elles sont l’une des clés de la confiance de l’épargnant, en particulier lorsque celui-ci doit
investir dans des produits de long terme.
Le devoir de conseil est ainsi le maillon essentiel entre la satisfaction des ménages et l’efficacité économique de leur investissement, dans un environnement économique très complexe. En témoignent les nombreuses questions sur l’assurance-vie posées aux juristes spécialisés sur la plateforme de l'ACP.
La commercialisation des produits financiers pose en outre des questions de protection de la clientèle. Le fournisseur de services financiers doit tenir compte du profil de ses clients, de leur âge, de leur patrimoine,
de leur horizon de placement et de leur aversion ou non pour le risque, et adapter son offre de placements, afin que l’investissement conseillé leur apporte ce qu’ils attendent et ce dont ils ont besoin. Garantir une
bonne information de l’épargnant est donc indispensable.
Au-delà, alors que les épargnants semblent aujourd’hui privilégier les produits liquides, comment répondre aussi à leurs besoins de financement à plus long terme et aux besoins de financement des autres 3 acteurs économiques ? Doit-on en tenir compte dans les modalités de commercialisation des produits financiers ? Tel sera le thème de la deuxième session.
III. Enfin, quel rôle pour les régulateurs ?
Les régulateurs suivent avec une grande attention les évolutions de l’allocation de l’épargne des ménages et les conditions de commercialisation des produits financiers.
Les évolutions des placements financiers des ménages peuvent avoir des répercussions sur la solidité des institutions financières. En effet, des mouvements trop brusques d’une forme d’épargne vers une autre
seraient par nature déstabilisateurs pour le système financier et donc pour l’ensemble de l’économie. Il en va de même pour les offres commerciales mal calibrées qui peuvent avoir des conséquences négatives sur la rentabilité des établissements, en particulier lorsque la rémunération des produits est sensiblement déconnectée des taux de marché.
Quant à la commercialisation des produits, elle est, je le répète, un instrument clé de la confiance de l’épargnant, notamment pour les placements de long terme dont nous connaissons l’importance
économique. L’ACP et l’AMF veilleront à ce que ces placements de long terme soient préservés et, en ce sens, le développement de pratiques de vente agressives et abusives auprès du public, n’est pas acceptable.
Plus généralement, nous veillerons à ce que les établissements de crédit et les organismes d'assurance fassent preuve de prudence dans leur recherche de ressources clientèle et de rigueur dans le respect des
règles protectrices de la clientèle.
Ce sera le thème de la table ronde de la troisième session qui conclura le colloque.
* * *
Je vous remercie de votre attention et cède donc la parole à Antoine Frachot qui va jouer le rôle de modérateur pour la première session.
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