par Jean-François Rosnoblet
MARSEILLE (Reuters) - Deux nouveaux repreneurs potentiels de la SNCM ont manifesté leur intérêt pour la compagnie maritime quelques jours avant la décision du tribunal de commerce de Marseille, qui pourrait faire mercredi son choix entre les trois candidats "fermes".
La SNCM, dont l'actionnaire majoritaire est Transdev, coentreprise entre la Caisse des dépôts et Veolia, a été placée fin novembre en procédure de redressement judiciaire.
Le tribunal de commerce doit se prononcer mercredi sur les offres de Daniel Berrebi, l'armateur de la compagnie Baja Ferries en position de favori, du transporteur corse Patrick Rocca et de la société d'investissement Med Partners de Christian Garin, ancien président du port de Marseille, qui est "clairement écartée" selon une source proche du dossier.
Mais la justice pourrait une nouvelle fois rejeter ces offres en raison de leurs insuffisances et décider de la poursuite de la période d'observation, jusqu'au 28 novembre, pour ouvrir la procédure à de nouveaux candidats.
Deux lettres d'intention sont parvenues ces derniers jours sur le bureau du président du tribunal de commerce.
La première émane du groupe STEF-TFE, spécialiste européen de la logistique du froid et propriétaire de la Compagnie Méridionale de navigation, partenaire historique de la SNCM.
Les deux compagnies assurent ensemble la délégation de service public (DSP) pour les dessertes entre la Corse et le continent, qui représente 96 millions d'euros par an et doit prendre fin le 1er octobre 2016.
La DSP avait été attribuée pour la période 2014-2023, ce qui a été contesté par la compagnie concurrente, Corsica Ferries, devant le tribunal administratif de Bastia. Ce dernier l'a annulée le 7 avril.
NOUVEAU REPORT RISQUÉ
L'offre de STEF-TFE, chiffrée entre 15 et 20 millions d'euros, prévoit de conserver environ 800 des 1.500 CDI de la Société nationale Corse Méditerranée (SNCM).
La seconde proposition a été déposée le 5 juin par un consortium représentant "60% du trafic maritime corse" selon la lettre d'intention publiée lundi par Corse-Matin.
Ce "consortium d'entrepreneurs corses représentant un chiffre d'affaires consolidé de plus d'un milliard d'euros" propose "une offre alternative sérieuse", peut-on lire dans le document signé par huit entreprises spécialisées dans la grande distribution, la location de voitures et les matériaux de construction.
Un nouveau report de la décision du tribunal, indispensable pour permettre le lancement d'un nouvel appel d'offres comme l'avait souhaité le procureur de la République, risque cependant de déplaire à la Commission européenne qui a réclamé un traitement urgent du dossier.
Le rapport rédigé par les deux administrateurs judiciaires, qui a servi de base à la réflexion du tribunal de commerce, souligne que, dans cette hypothèse, se poserait le problème des aides jugées illégales, 440 millions d'euros que Bruxelles a accepté de ne plus réclamer au repreneur parce que la "discontinuité économique" -- l'arrêt de la SNCM -- est établie.
La poursuite de la période d'observation nécessiterait également de nouveaux apports financiers conséquents de la part d'actionnaires qui s'y refusent.
Transdev et l'Etat ont donné leur accord pour le financement du plan de sauvegarde de l'emploi à hauteur de 85 millions d'euros, une somme suffisante pour couvrir l'intégralité du coût estimé du plan social résultant de l'adoption éventuelle par le tribunal de l'offre la moins disante socialement.
L'accord prévoit également un abandon de créances d'un montant cumulé de plus de 120 millions d'euros.
Dans ce contexte, les organisations syndicales de la SNCM ont rejeté, le 26 mai, les trois offres fermes soumises au tribunal de commerce, les jugeant "largement insuffisantes" sur le nombre de salariés repris.
Elles redoutent une "vente à la découpe" et ont déposé un préavis de grève de 24 heures renouvelable pour la journée du 11 juin, au lendemain de la décision du tribunal de commerce.
(Edité par Yves Clarisse)