par Koh Gui Qing et Kazunori Takada
PEKIN/SHANGHAI (Reuters) - Les Bourses chinoises ont nettement rebondi jeudi à la suite de nouvelles mesures de soutien des autorités pour tenter d'enrayer leur chute, l'indice Shanghai Composite connaissant même sa plus forte hausse en six ans.
Après plusieurs vaines tentatives pour mettre fin au "krach" boursier commencé en juin, l'autorité de régulation des marchés boursiers chinois, la CSRC, a interdit mercredi soir aux actionnaires détenant des participations supérieures à 5% dans des sociétés cotées de vendre leurs titres pendant une période de six mois.
Cette interdiction ne devrait avoir que peu d'impact pour les investisseurs étrangers, dont les participations dans les sociétés cotées à Shanghai sont majoritairement inférieures à ce seuil.
La China Development Bank et l'Export-Import Bank of China, deux établissements qui sont le bras financier de Pékin, se sont engagées à ne pas vendre d'actions chinoises, envisageant au contraire de procéder à des rachats à bon compte, a rapporté l'agence Chine Nouvelle jeudi.
L'autorité de tutelle bancaire de son côté a fait savoir que les crédits adossés à des actions pourraient être renouvelés.
Au lendemain de ces annonces, l'indice CSI300 des grandes valeurs cotées à Shanghai et Shenzhen a bondi de 6,4% à 3.897,63 points, tandis que l'indice Shanghai Composite s'est adjugé 5,8% à 3.710,27 points, sa plus forte hausse depuis mars 2009.
Les analystes estiment cependant qu'il est prématuré d'annoncer la fin du mouvement de correction, d'autant plus que les performances des indices sont faussées par la suspension de près de 1.500 sociétés, ce qui représente un montant cumulé de capitalisation d'environ 2.500 milliards d'euros.
"Les sauveteurs sont loin de pouvoir crier victoire alors que plus de la moitié des sociétés inscrites sont suspendues", selon Du Changchun, analyste de Northeast Securities à Shanghai.
LES USA SONT INQUIETS
Les marchés chinois, dont la capitalisation avait plus que doublé au cours du premier semestre, notamment sous l'effet du trading de marge, ont plongé de plus de 25% depuis la mi-juin.
Déjà confrontées à un ralentissement de la croissance chinoise, les autorités politiques ont réagi en mettant en place une série de mesures pour les soutenir: baisse des taux d'intérêt, suspension des introductions en Bourse, incitation des sociétés de courtage à acheter des actions garanties par des liquidités de la banque centrale.
"Nous sommes enclins à croire que Pékin va intensifier ses réponses jusqu'à ce que (ces mesures) commencent à fonctionner", relèvent des économistes de Crédit Suisse.
"Faute de stabilisation des conditions de marché, nous nous attendons à ce que le gouvernement chinois s'engage 'coûte que coûte', étant donné que la stabilité sociale est en jeu et que les risques financiers systémiques sont manifestes".
Pour certains investisseurs, une déstabilisation du système financier consécutive à la correction boursière chinoise constitue en effet un risque plus important que la crise grecque.
Les Etats-Unis ont notamment fait part de leur inquiétude, par la voix du secrétaire au Trésor Jack Lew. "La crainte, réelle, porte sur la signification de tout cela en terme de croissance à long terme en Chine", a-t-il déclaré mercredi.
D'autres voix plus optimistes se font néanmoins entendre, d'autant plus que, rapportés au produit intérieur brut (PIB), les marchés boursiers chinois restent plus petits que ceux de nombreux pays développés.
Sans compter que l'appel au marché représente une part minoritaire du financement des entreprises chinoises.
"Même si le mouvement de liquidation des actions se poursuit un certain temps en Chine continentale, nous doutons que cela exerce des effets délétères significatifs sur l'économie chinoise", estime David Rees, économiste chez Capital Economics.
Et pour Christopher Moltke-Leth, de Saxo Capital Markets, "le gouvernement sera capable de stabiliser le marché car il a de nombreux outils à sa disposition".
(Avec les bureaux de Pékin, Shanghai, Hong Kong et Washington; Danielle Rouquié, Bertrand Boucey et Myriam Rivet pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)