La Chine, qui a enregistré en trente ans une croissance extraordinaire portée par ses exportations, doit désormais réfléchir à des réformes internes pour l'aider à passer du statut de pays émergent à celui de puissance établie du monde développé.
Alors que des experts se penchaient, mercredi, au premier jour du Forum économique mondial (Wef) de Davos (Suisse), sur l'état de la planète, l'admiration pour le miracle économique chinois était tempérée par des inquiétudes quant à l'adaptation du géant asiatique à ses nouvelles responsabilités sur la scène économique internationale.
L'industrie manufacturière chinoise, qui reposait jadis sur une main d'oeuvre bon marché, utilise aujourd'hui une population de plus en plus âgée tandis que la réussite économique a généré des déséquilibres commerciaux globaux qui ont affaibli les économies de ses clients.
Reste que l'ancien "outsider" est de plus en plus perçu comme détenteur d'une responsabilité pour préserver la stabilité mondiale qui signifie aux yeux des Occidentaux une appréciation du cours de sa monnaie et une relance de la demande intérieure.
Confrontés au risque de l'inflation et d'une bulle spéculative, les responsables chinois -- venus en force comme l'an dernier à Davos --, ont accepté l'idée d'une plus grande flexibilité monétaire et la nécessité de faire reposer davantage leur économie sur la demande intérieure.
Mais ils exhortent parallèlement l'Occident à ne pas presser leurs dirigeants à accomplir un changement trop rapide, de peur que se reproduisent les crises qui ont cassé la croissance japonaise il y a vingt ans et ont fortement endommagé les économies de "tigres" asiatiques.
En particulier, ils estiment que l'Occident ne devrait pas pousser Pékin à rendre le yuan pleinement convertible trop rapidement.
"Cela ne peut se passer trop vite, mais j'ai maintenant le sentiment que le gouvernement chinois tente d'une certaine manière de faire aboutir (cette appréciation de la monnaie) dans les prochaines années", a déclaré à l'AFP Wang Boming, du magazine chinois Caijing.
"Chaque année, l'appréciation va s'accélérer", a-t-il déclaré. "Si vous savez gérer de manière effective votre système financier, je ne pense vraiment pas que cela peut nuire. Les régulateurs chinois, dans un processus très graduel, doivent s'y habituer. Cela prend du temps mais je vois la lumière au bout du tunnel. Cela se produira d'ici cinq ans", a-t-il ajouté.
Auparavant, lors d'un séminaire à huis clos à Davos, des experts et chefs d'entreprise chinois avaient accepté largement ces vues, et jugé le temps venu pour la Chine, après sa révolution économique, de procéder aux changements politiques et sociaux.
Ils envisagent de plus en plus que la Chine abandonne sa politique démographique d'un enfant par couple, alors que sa population toujours plus âgée est de moins en moins en mesure de répondre aux besoins d'embauche de ses usines.
Ils reconnaissent qu'une meilleure couverture des soins de santé et plus de petits enfants pourraient persuader les Chinois de dépenser une plus grande partie de leur épargne. Une industrie technologiquement plus novatrice pourrait par ailleurs offrir des emplois aux nombreux diplômés de haute qualification que compte la Chine.
"La Chine ne peut reposer sur un modèle de croissance tiré par les exportations", a déclaré devant un panel d'experts l'ancien vice-président de la Banque centrale Zhu Min, en soulignant à quel point d'autres pays asiatiques dépendant de leurs exportations ont été durement frappés par la crise économique et financière de 2008.