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La BCE face à un test historique

Publié le 18/01/2015 15:41
© Reuters. LA BCE FACE À UN TEST HISTORIQUE

par Paul Taylor

LONDRES (Reuters) - La réunion de politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) jeudi constituera sans doute un test clé de sa détermination à faire "tout ce qu'il faudra" pour préserver l'euro, qui pourrait la conduire à acheter des emprunts d'Etat pour combattre le risque de déflation et relancer l'économie.

La Cour européenne de justice et la Banque nationale suisse (BNS) ont dégagé la voie à une telle politique d'"assouplissement quantitatif" (quantitative easing, QE) mais l'opposition de l'Allemagne à ce virage sans précédent risque de compliquer la tâche de l'institution.

Le principal risque à ce stade serait que le choix d'un QE "allégé", visant à surmonter les réticences allemandes, soit mal perçu par les marchés, rate ses objectifs et nuise à la crédibilité de la BCE.

Alors que la Bundesbank s'oppose au QE, qu'elle considère comme la porte ouverte au financement des Etats par la banque centrale, un tabou pour le contribuable allemand, les partisans des achats d'obligations souveraines espèrent qu'Angela Merkel -que Mario Draghi, le président de la BCE, a rencontrée en tête-à-tête ces derniers jours- ne dénoncera pas ce choix.

Certains promoteurs du QE craignent toutefois de voir Mario Draghi accorder trop de concessions à Berlin en imposant au nouveau programme des limites trop contraignantes en termes de taille et de champ d'application, en refusant le partage du risque entre les Etats membres et en excluant les obligations des pays les plus mal notés.

Un projet élaboré par les services de la BCE ces dernières semaines prévoyait un plafonnement du montant des achats à 500 milliards d'euros alors que pour certains analystes, il faudrait au moins deux fois cette somme pour atteindre le but recherché.

LE RISQUE D'UN QE "ALLÉGÉ"

Mario Draghi peut compter sur une majorité au sein du Conseil des gouverneurs mais il semble certain que les deux membres allemands de celui-ci, Jens Weidmann (président de la Bundesbank) et Sabine Lautenschläger (qui siège au directoire) voteront contre le QE jeudi. Quelques autres gouverneurs pourraient se joindre à eux.

L'une des options envisagées, disent des sources au sein de la BCE, consisterait à faire supporter par chacune des 19 banques centrales nationales de la zone euro le risque de défaut lié à la majeure partie ou la totalité des titres de son pays rachetés dans le cadre du programme.

"Ce serait au mieux inefficace, au pire dangereux", juge Guntram Wolff, directeur de l'institut européen Bruegel à Bruxelles.

Pour l'économiste danois Niels Thygesen, qui a contribué à l'élaboration du projet originel de monnaie unique dans les années 1980, "un QE dans ce cadre-là pourrait ne pas valoir le coup, même pour ses plus farouches partisans".

Pourtant, Mario Draghi peut s'appuyer sur les conclusions rendues mardi par l'avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne, qui estime que des achats d'obligations seraient légaux et que la justice doit traiter avec prudence les procédures judiciaires engagées contre la BCE, faute de disposer de la même expertise qu'elle en la matière.

Si ses conclusions portent sur les OMT (opérations monétaires sur titres), un autre programme d'achats d'actifs contre lequel des eurosceptiques allemands ont porté plainte, elles peuvent parfaitement s'appliquer au QE.

En particulier, l'avocat général estime que rendre public à l'avance un éventuel plafond des achats envisagés pourrait nuire à leur efficacité, que la BCE ne doit pas bénéficier d'un statut plus avantageux que celui des créanciers privés en cas de restructuration d'une dette et que rien ne l'empêche d'acheter des titres émis par des pays dont la note souveraine est basse.

Ainsi, Mario Draghi a en théorie les mains libres pour acheter autant d'obligations d'Etat qu'il le souhaite, proportionnellement à la part de ces Etats au capital de la BCE, et pour le faire sur la durée nécessaire pour faire remonter l'inflation vers l'objectif d'un taux inférieur à mais proche de 2%.

EFFET DE SIGNAL ET EFFET DE PORTEFEUILLE

Voilà pour la théorie. Mais la politique peut bien sûr compliquer les choses.

Pour les économistes, un QE peut relancer l'économie et la hausse des prix par deux moyens distincts: "l'effet de signal" et "l'effet de portefeuille".

Le premier décrit le message sans ambiguïté adressé par la banque centrale aux marchés financiers sur sa détermination à utiliser les ressources nécessaires pour atteindre son but. En la matière, la Réserve fédérale américaine est l'exemple le plus fréquemment cité.

"Tout comme les marchés savent qu'il ne faut jamais s'opposer à la Fed, ils doivent comprendre qu'il ne faut pas parier contre la BCE", résume un haut responsable de l'Eurosystème.

L'effet de portefeuille, lui, décrit le mécanisme par le biais duquel une banque centrale crée de la monnaie pour acheter des obligations aux banques, aux assureurs et aux fonds de pension, monnaie réinvestie dans des actifs offrant de meilleurs rendements, comme les actions ou les obligations d'entreprise, souvent en dehors de la zone euro.

Ces sorties de capitaux font baisser le taux de change, favorisant ainsi les exportations, tout en renchérissant les importations, donc en faisant augmenter les prix.

L'euro est déjà revenu de près de 1,40 dollar en mai à 1,15 vendredi, sa baisse s'accélérant au fur et à mesure que la probabilité estimée d'un QE augmentait. Et la BNS a amplifié ce mouvement en abandonnant jeudi le cours plancher du franc suisse face à la monnaie unique, renonçant ainsi à acheter de l'euro.

© Reuters. LA BCE FACE À UN TEST HISTORIQUE

Cette décision inattendue et les turbulences financières qu'elle a provoquées montrent à quel point il est difficile pour les banques centrales de dompter des marchés volatils. Et à quel point la crédibilité, souvent lente à construire, peut être rapidement remise en cause. Un enseignement à méditer pour la BCE d'ici jeudi.

(Marc Angrand pour le service français)

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