Mine d'or noir chérie par les indépendantistes écossais, le bassin pétrolier de la mer du Nord peine à se trouver un second souffle après 40 ans d'exploitation, entre exploration en panne et flambée des coûts.
Depuis le milieu des années 1970, 42 milliards de barils équivalent pétrole (bep) ont été extraits, offrant une manne financière bienvenue au Royaume-Uni et une prospérité économique à toute la région.
Les recettes fiscales à venir de ce gisement sont désormais au coeur d'un vif affrontement entre tenants et opposants de l'indépendance écossaise, sujette à référendum dans quelques semaines. Londres table sur 17,6 milliards de livres de rentrées pour les cinq prochaines années tandis qu'Edimbourg parie sur 38,7 milliards dans son scénario le plus optimiste.
Mais au-delà de la polémique politique, un fait reste peu discutable: le trésor de la mer du Nord se fait moins généreux. Il ne resterait que 24 milliards de bep selon les estimations les plus favorables et la production britannique de pétrole et de gaz a chuté de 38% ces trois dernières années, tombant en 2013 au plus bas depuis 1977 (à 1,43 million de bep par jour).
Ce "déclin est inévitable, parce que l'essentiel des grands champs ont été découverts et que le pétrole facile à produire a été extrait", explique John Howell, professeur de géologie pétrolière à l'université d'Aberdeen.
"Cela va être dur de renverser la tendance car c'est un bassin mature. Il y a un certain nombre de projets qui pourraient bientôt se concrétiser et aider à ralentir ce déclin, mais nous n'envisageons pas une hausse significative de la production", prévient Graham Sadler, directeur général de Petroleum Services Group, une division du cabinet Deloitte.
Au cours des cinq prochaines années, la production devrait se stabiliser autour de son niveau de 2013, avant un nouveau déclin à partir de 2019, selon les prévisions du ministère britannique de l'Énergie et du Changement climatique (DECC).
Un peu plus optimiste, la fédération du secteur pétrolier et gazier britannique Oil & Gas UK envisage un léger rebond à partir de 2014, jusqu'à 1,7 million de bep par jour en 2018.
De même, l'économiste Thomas Pugh, du centre de recherches Capital Economics, envisage une légère hausse dans les prochaines années, notamment grâce à des prix du pétrole élevés et stables, à une politique fiscale favorable aux investissements et aux avancées techniques en matière d'extraction.
De récentes déductions fiscales pour certains puits (techniquement difficiles à exploiter, par exemple) ont ainsi permis une forte hausse des investissements, qui ont atteint l'année dernière le niveau record de 14,4 milliards de livres.
- Imbroglio fiscal -
Oil & Gas UK souligne néanmoins que "d'importants doutes subsistent sur les perspectives de production pour le reste de la décennie".
"Fondamentalement, pour soutenir la production ou atténuer le déclin, nous avons besoin de nouvelles découvertes (...). Actuellement, il y a très peu de forage d'exploration", s'inquiète aussi M. Sadler, qui plaide pour des incitations fiscales à l'exploration comme celles qui existent en Norvège.
Un autre défi est la maîtrise des coûts d'exploitation, qui ont bondi de 15,5% en 2013 et devraient encore nettement progresser en 2014, une tendance "insoutenable" selon Oil & Gas UK.
"Malheureusement, au moment où la taille des champs exploitables diminue en mer du Nord, les coûts augmentent", juge M. Sadler, qui signale que les opérateurs sont "alarmés" par l'escalade des coûts.
Ces derniers souhaiteraient aussi une "politique fiscale plus stable", ajoute le directeur général de Petroleum Services Group, alors que le gouvernement a lancé mi-juillet une consultation sur le sujet.
"Le régime fiscal actuel est devenu de plus en plus compliqué et imprévisible avec des taux d'imposition élevés (entre 62% et 81% contre un impôt standard sur les sociétés de 21%, ndlr) combinés à une multitude de déductions", critiquait récemment Michael Tholen, directeur économique d'Oil & Gas UK.
Enfin, dans un environnement d'infrastructures vieillissantes, une plus grande collaboration est requise entre les acteurs du secteur, comme l'a préconisé le rapport Wood sur la maximisation des ressources de la mer du Nord, commandé par le gouvernement britannique et publié en février.
Pour faciliter et susciter cette coopération, ce rapport appelait à la mise en place d'un organe régulateur aux pouvoirs accrus, qui devrait voir le jour à partir de cet automne.