La récolte de céréales de la Russie, premier pays exportateur de blé, devrait atteindre cette année un niveau record pour la période post-soviétique mais les agriculteurs sont pénalisés par la faiblesse des prix, a indiqué mardi la fédération des céréaliers.
"La récolte est prévue dans une fourchette entre 114 et 118 millions de tonnes, c'est du jamais vu pour la période post-soviétique", a déclaré Arkadi Zlotchevski, président de l'Union russe céréalière, lors d'une conférence de presse.
Le ministère de l'Agriculture prévoit de son côté une récolte entre 106 et 110 millions de tonnes.
Le record historique enregistré par le pays, aux fertiles "terres noires" proches de la mer Noire, remonte à 1978 à 127 millions de tonnes, avec des surfaces cultivées bien plus vastes qu'actuellement, a observé le représentant agricole. Depuis la chute de l'URSS en 1991, le maximum était de 108 millions de tonnes, en 2008.
Au 15 août, après récolte de 21,9 millions d'hectares (46% des surfaces semées), 72,7 millions de tonnes de céréales avaient été sorties des champs (dont 51,1 millions de tonnes de blé), contre 57 millions de tonnes à la même date l'an dernier, selon le ministère de l'Agriculture.
La récolte avait déjà été très abondante l'an dernier à 104,8 millions de tonnes, ce qui avait permis à la Russie d'atteindre un record d'exportations à 33,9 millions de tonnes sur la campagne 2015-2016 et de dépasser les Etats-Unis comme premier fournisseur de blé de la planète (24,6 millions de tonnes).
Pour la campagne en cours (juillet 2016-juin 2017), les ventes à l'étranger pourraient encore augmenter à 38,5 millions de tonnes toutes céréales comprises, a estimé M. Zlotchevski.
"Un record (de production) est une bonne chose, il faut s'en réjouir, mais il présente des risques significatifs", a-t-il cependant observé, s'inquiétant du très faible niveau des prix sur le marché intérieur, une tendance qui s'aggrave actuellement avec l'arrivée de cette moisson abondante.
"Cette moisson fantastique n'apporte pas de bons revenus aux agriculteurs (...) et si la tendance se poursuit, nous arriverons sous le seuil de rentabilité", a-t-il prévenu.
"Cela peut provoquer des faillites massives d'exploitations", a-t-il ajouté, s'inquiétant également des fonds disponibles pour les semis d'automne.
Pour soutenir le monde agricole, le responsable céréalier a appelé le gouvernement a abolir les barrières douanières mises en place début 2015. Son objectif était alors d'éviter une envolée des prix sur le marché intérieur sous l'effet de l'effondrement du rouble.
Selon M. Zlotchevski, cette mesure constituait "une erreur" et a coûté environ 50 milliards de roubles aux agriculteurs, soit près de 700 millions d'euros au taux actuel.
Il a également mis en garde contre les conséquences du manque de silos disponibles pour stocker la récolte puisque la capacité actuelle est de l'ordre de 120 millions de tonnes, à peine plus que la moisson prévue. Or d'importantes réserves restent de la moisson de l'an dernier.
Les exploitations sont donc susceptibles de conserver les céréales dans des lieux inadaptés ce qui "menace d'abord la qualité et ensuite la quantité" finale.
"Le ministère de l'Agriculture ne prévoit pas de déficit de capacité de stockage", a assuré le ministre Alexandre Tkatchev à l'agence TASS. Il a jugé "possibles" des difficultés "locales en Sibérie" en cas de récolte atteignant 115 millions de tonnes mais rappelé que le ministère prévoyait une récolte inférieure à 110 millions de tonnes.