Les ministres des Finances de la zone euro vont déclarer mardi l'Espagne et le Portugal en dérapage budgétaire, ouvrant la voie à une procédure de sanctions inédite dans l'histoire de la monnaie unique.
"Les membres de la zone euro vont soutenir demain la recommandation de la Commission européenne", qui avait déclaré jeudi l'Espagne et le Portugal en dérapage budgétaire, a annoncé Jeroen Dijsselbloem, le président de l’Eurogroupe, à l'issue d'une réunion des grands argentiers de la monnaie unique, à Bruxelles.
Selon les règles de procédure, chacun des deux pays se prononcera sur l'autre, mais pas sur lui-même.
A partir du moment où les ministres de la zone euro, dans le cadre d'une réunion des grands argentiers de l'UE prévue mardi dans la capitale belge, "vont dans notre sens, s'ouvre alors une période de 20 jours" pendant laquelle la Commission européenne évaluera les sanctions possibles à l'encontre des deux pays, a précisé le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, lors d'une conférence de presse avec M. Dijsselbloem.
M. Moscovici a rappelé que les amendes possibles étaient "au maximum de 0,2%" du Produit Intérieur Brut (PIB) et au "minimum zéro".
Dans le cadre de cette échéance de vingt jours, l'exécutif européen "doit aussi proposer la suspension d'une partie des engagements de versements de fonds structurels européens" à partir de 2017.
Selon une source européenne, les fonds concernés pour l'an prochain s'élèvent pour l'Espagne à 1,3 milliard d'euros et pour le Portugal à 500 millions d'euros.
"Nous allons engager un processus de dialogue avec les ministres" de l'Espagne et du Portugal, a expliqué M. Moscovici, les incitant à faire valoir "le plus vite possible" leurs arguments pour expliquer pourquoi ils ont dérapé et ce qu'ils veulent faire pour améliorer leur situation budgétaire.
Les deux pays disposent de dix jours à compter du constat de dérapage par leurs pairs de la zone euro.
En arrivant à Bruxelles, le ministre espagnol de l'Economie, Luis de Guindos, s'était montré confiant : "La raison pour laquelle je suis optimiste, c'est le non-sens que supposerait une sanction (imposée) à l'Espagne", avait-il expliqué.
M. de Guindos avait de nouveau dit espérer que son pays - qui a divisé par deux son déficit public entre 2012 et 2015 grâce à d'immenses efforts budgétaires - passerait sous la barre des 3% du Produit Intérieur Brut (PIB) en 2017, rentrant ainsi dans les clous des règles européennes.
- "Interprétation intelligente" -
Le gouvernement portugais s’emploie, quant à lui, à éviter à tout prix des conséquences financières des recommandations de la Commission européenne, a indiqué le ministre des Finances Mario Centeno, plaidant pour une "interprétation intelligente" du pacte budgétaire.
Interrogé par les médias portugais sur la possibilité de voir une éventuelle sanction appliquée à Lisbonne réduite à zéro, il a estimé que c'était "une issue possible".
Une fois que la Commission européenne aura fait ses propositions de sanctions - probablement décidées lors la réunion de tous ses commissaires le 27 juillet -, les ministres des Finances de la zone euro devront à nouveau donner leur feu vert.
Selon une source européenne, ils pourraient opter pour un aval par procédure écrite, sans avoir besoin d'une nouvelle réunion imprévue, en plein été.
En 2015, le déficit public espagnol a atteint 5% du produit intérieur brut (PIB), bien au-delà du seuil du pacte de stabilité (3% du PIB) et des objectifs que lui avait fixés la Commission, à 4,2%.
Il devrait aussi déraper en 2016, alors que l'Espagne n'est pas encore parvenue à former un gouvernement après les élections législatives du 26 juin, précédées de six mois de blocage politique.
Quant au Portugal, il avait affiché un déficit public de 4,4% du PIB l'an passé alors que l'objectif fixé était de repasser sous les 3%. En 2016, le pays espère toutefois rentrer dans les clous.