PARIS (Reuters) - Après une parenthèse de trois ans à gauche inédite sous la Ve République, l'opposition de droite semblait dimanche en passe de reconquérir le Sénat, dont les sièges sont renouvelés de moitié.
Plusieurs sièges avaient déjà basculé à droite au premier tour à la mi-journée, selon des résultats partiels portant sur les départements n'élisant qu'un ou deux sénateurs selon un mode de scrutin majoritaire.
Après la déroute des élections municipales et des européennes, la gauche s'acheminerait vers une troisième défaite.
En Corrèze, fief de François Hollande où deux sièges étaient à pourvoir, l'UMP Daniel Casseing ravit un siège à la gauche.
Dans le Territoire de Belfort, le siège de l'ancien ministre de François Mitterrand Jean-Pierre Chevènement, qui ne se représentait pas, échoit à l'UMP Cédric Perrin. En Haute-Saône, les UMP Alain Joyandet et Michel Raison ravissent deux sièges à la gauche.
En Corse-du-Sud, où le radical de gauche Nicolas Alfonsi ne se représentait pas, le siège est conquis par l'UMP Jean-Jacques Panunzi, président du conseil général, élu avec 86,4% des voix.
En Ardèche, l'UMP Jacques Genest s'empare d'un des deux sièges. Dans l'Aveyron, où les deux sièges étaient détenus par la gauche, l'UDI Jean-Claude Luche s'impose avec 60,80%.
Dans le Tarn-et-Garonne, le divers gauche Yvon Collin est réélu, mais le président du Parti radical de gauche (PRG), Jean-Michel Baylet, est en ballottage défavorable (37,40%) face au divers droite François Bonhomme (43,91%).
BAROIN ÉLU, RAFFARIN RÉÉLU
L'ancien ministre UMP François Baroin (76,58%) fait son entrée à la haute assemblée après cinq mandats de député dans le département de l'Aube, qui reste ancré à droite avec la réelection de Philippe Adnot (DVD).
L'ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, qui brigue la présidence du Sénat, a été réélu dans la Vienne au côté de l'autre UMP Alain Fouché avec 59,61% des voix.
Les 158.159 "grands électeurs" sont convoqués pour élire 178 des 348 sénateurs et la large victoire de l'UMP et des centristes de l'UDI aux dernières municipales a de fait des conséquences mécaniques sur la composition du nouveau Sénat.
Le collège électoral regroupe les députés (577), les conseillers régionaux (1.880), les conseillers généraux (4.052), 192 élus non municipaux d'Outre-mer mais surtout 151.458 délégués des conseils municipaux (95,8% du collège).
Le sénateur UMP Roger Karoutchi estime qu'une majorité droite-centre devrait compter de 182 à 185 sièges à l'issue du scrutin, la majorité absolue étant fixée à 175.
Dans les rangs de la gauche, on se résigne par avance à retrouver les bancs de l'opposition à la haute assemblée, réputée "imperdable" par la droite, même si Didier Guillaume, le président du groupe socialiste, a annoncé qu'il briguerait la présidence en remplacement du sortant Jean-Pierre Bel.
A gauche, tous les groupes devraient subir des revers, sauf les écologistes, qui abordent le scrutin avec sérénité puisqu'aucun de leurs sénateurs n'est soumis à renouvellement.
LE FN AUX PORTES DU SÉNAT
Le Front national espère créer la surprise dans le Sud, notamment dans le Gard, le Vaucluse et les Bouches-du-Rhône. Stéphane Ravier, qui a conquis en mars dernier la mairie du 7e secteur de Marseille, compte se faire élire et devenir le premier sénateur du parti d'extrême droite.
Pour l'exécutif, l'impact de cette défaite annoncée sera limitée, d'autant plus que, selon un sondage Ifop pour Ouest France, le scrutin n'intéresse qu'un tiers des Français.
Si la gauche dispose actuellement d'une majorité de six voix au Sénat, elle est très virtuelle puisque le Front de gauche, les écologistes et quelques radicaux votent souvent contre les projets de loi présentés par le gouvernement.
Cette situation ralentit les débats mais n'empêche nullement l'adoption définitive des textes, sauf ceux qui modifient la Constitution, puisque l'Assemblée nationale a le dernier mot.
Après le scrutin, une autre bataille commencera dans les salons feutrés du Sénat pour l'élection de son président.
Outre Didier Guillaume et la centriste Nathalie Goulet, trois UMP, les mêmes qu'en 2008, briguent le "plateau" : Gérard Larcher, Jean-Pierre Raffarin et Philippe Marini.
Le groupe UMP organisera le 30 septembre une "primaire" interne afin de désigner son candidat. Gérard Larcher, qui présida le Sénat de 2008 à 2011, est donné favori.
Les sénateurs se réuniront le 1er octobre pour élire leur président, protocolairement le deuxième après le président de la République, qu'il remplace en cas de vacance du pouvoir, et avant celui du Premier ministre.
La haute assemblée, qui est élue au suffrage universel indirect, est renouvelable par moitié tous les trois ans. Sont concernés dimanche 58 départements métropolitains de l'Ain à l'Indre et du Bas-Rhin au Territoire de Belfort.
Parmi les 178 sièges concernés, 119 sont à pourvoir à la représentation proportionnelle dans les circonscriptions où sont élus trois sénateurs et plus et 59 au scrutin majoritaire dans les circonscriptions élisant un ou deux sénateurs.
(Sophie Louet et Emile Picy)