NANTES (Reuters) - Le nouveau marché du drone civil doit faire face à une explosion en France du nombre de pilotes professionnels, qui peinent parfois à trouver des débouchés en dépit de potentiels usages révolutionnaires régulièrement cités, selon ses acteurs.
Ces opérateurs, dont le nombre d'inscrits auprès de la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) est passé de 162 à 1.600 en l'espace de trois ans, sont au coeur d'un nouveau salon spécialisé qui s'est ouvert vendredi à Nantes pour deux jours, où les organisateurs tentent de les mettre en relation avec de nouveaux clients.
"La plupart des opérateurs sont des passionnés d'aéromodélisme, qui se sont installés comme auto-entrepreneurs", constate Anne-Marie Haute, 43 ans, déléguée locale pour la Fédération professionnelle du Drone civil. "Mais certains se lancent sans même avoir une idée de leurs clients potentiels... Or, chef d'entreprise, c'est aussi un métier."
Moins cher qu'un hélicoptère ou une équipe de cordistes, et sans risques humains, le drone peut pourtant répondre à des usages très divers d'un point de vue économique.
"Il y a encore deux ans, 90 % des pilotes s'adressaient au monde du visuel ; aujourd'hui on est passé à 65 % et, dans cinq ans, la plupart travailleront pour l'inspection de sites industriels ou pour l'agriculture", prédit ainsi celle qui est aussi présidente de Pilgrim Technology, un constructeur de drones installé près de Nantes.
TRAVAIL AU NOIR
Reste pour cela à lutter contre le travail au noir de certains dronistes amateurs, qui "n'hésitent pas à proposer une vue aérienne de votre maison pour 50 euros" sur des sites de petites annonces.
"Ils n'ont pourtant aucune assurance professionnelle si le drone venait à tomber sur un enfant", déplore la dirigeante de cette PME de dix salariés, initialement spécialisée dans l'inspection de sites industriels.
Reste aussi à convaincre les grands donneurs d'ordres, comme EDF (PARIS:EDF) ou la SNCF, qui ont pu être refroidis par les survols suspects de sites sensibles et pour qui l'image des drones reste parfois celle d'un "jouet", même si l'opérateur ferroviaire vient de signer un contrat avec Delair-tech, leader du drone professionnel, pour surveiller ses voies.
De nouveaux usages "révolutionnaires" pourraient par ailleurs en rester au stade de projets si la réglementation et l'autonomie énergétique des drones demeuraient en l'état.
"Nous ne savons pas si nous aboutirons, car il y a plusieurs contraintes techniques et il faut obtenir des évolutions de la réglementation", confirme Jean-Dominique Lauwereins, co-fondateur de BeTomorrow, une start-up bordelaise impliquée dans un consortium qui veut faire transporter par des drones des médicaments et des prélèvements sanguins d'ici à 2018.
"Aujourd'hui il n'est pas possible de se déplacer en drone en ville à plus de 100 mètres du pilote", poursuit ce dernier. "Là, il s'agira d'un drone autonome, qui devra lui-même détecter des obstacles en mouvement ou fixes, comme un hélicoptère ou une grue de chantier."
Le projet, baptisé "Drones for life", sera officiellement présenté lors du congrès mondial ITS des transports intelligents, organisé cette année à Bordeaux du 5 au 9 octobre.
(Guillaume Frouin et Claude Canellas, édité par Yves Clarisse)