PARIS (Reuters) - La CGT a annoncé mercredi soir qu'elle ne participerait pas à la conférence sociale prévue lundi prochain, dans un climat tendu par le conflit à Air France.
La décision a été prise par la commission exécutive de la CGT réunie à Limoges en marge de la célébration des 120 ans du syndicat, qui conteste l'ordre du jour de ce rendez-vous entre les partenaires sociaux et le gouvernement, et son organisation.
"La CE a décidé qu'au regard d'un certain nombre d'éléments concernant l'organisation et le contenu de la conférence, du peu de place laissé à l'intervention des organisation syndicales et de ce qui s'est passé à Air France, la CGT ne participerait pas à la conférence sociale", a déclaré à Reuters Virginie Gensel, membre de la commission et du bureau confédéral.
"En même temps, nous demandons l'ouverture de négociations sur les questions liées au compte personnel d'activité et à la sécurité sociale professionnelle", a-t-elle ajouté.
La CGT souhaitait que la question du temps de travail et des salaires soit discutée à la conférence de lundi, a-t-elle rappelé. "On n'a pas été entendu. Là aussi on demande l'ouverture de négociations sur l'ensemble des ces sujets-là."
Le secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen, a regretté un coup porté au dialogue social.
"Tout ce qui laisse à penser que les partenaires sociaux ne sont pas capables de dialoguer même lorsqu'il ne sont pas d'accord, je pense que c'est un mauvais coup porté au dialogue social", a-t-il dit sur BFM TV. "Il existe des tensions à l'intérieur de la CGT et ces tensions se résolvent vers l'extérieur."
Les principales organisations patronales et syndicales sont conviées à la réunion de lundi, dont le discours d'ouverture sera prononcé par le chef de l'Etat, François Hollande.
"GRAND-MESSE"
Le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, avait laissé entendre mercredi matin sur Europe 1 que son organisation envisageait de la boycotter.
Il avait notamment évoqué les rebondissements judiciaires du dossier Air France, dont l'arrestation à leur domicile de salariés soupçonnés d'avoir malmené des cadres dirigeants et blessé des vigiles. Cinq d'entre eux, militants de la CGT, passeront en jugement début décembre.
Leur arrestation a contribué à crisper les relations entre gouvernement et syndicalistes, malgré les appels à un dialogue social apaisé lancés par le Premier ministre, Manuel Valls, ou François Hollande.
Mardi, un membre de la CGT a refusé de serrer la main au président de la République, en visite sur les chantiers navals STX de Saint-Nazaire. A Lyon, le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, a été hué par une centaine de manifestants, parmi lesquels des cégétistes.
"Il y a des salariés qui sont mécontents et c'est ce qu'on dit depuis plusieurs mois. Il est temps que le gouvernement prenne en compte ce mécontentement et prenne des actes concrets vis-à-vis des salariés", a commenté Philippe Martinez.
"Le militant du chantier (STX, NDLR) a répété à M. Hollande un certain nombre de choses que nous répétons depuis des mois et des mois, notamment je pense à la question des salaires."
Trois tables rondes sont prévues lors de la conférence sociale, sur la "sécurisation des parcours professionnels et la création du compte personnel d'activité", sur la transition énergétique et une troisième sur la "transformation numérique".
Mais pour la CGT, le contenu n'est pas seul en cause.
"Il y a la question de la forme", a dit Philippe Martinez. "Comment on conçoit le dialogue social : est-ce que (...) on va à une grand-messe ou est-ce que les organisations syndicales peuvent s'exprimer ?"
La CGT, Force ouvrière et la FSU avaient déjà boudé une partie de la conférence sociale de l'année dernière, organisée sur deux jours, pour manifester leur opposition à une politique jugée trop favorable au patronat.
(Simon Carraud, avec Emmanuel Jarry, édité par Grégory Blachier)