Les syndicats agricoles ont décidé dimanche d'accentuer la pression sur Lactalis, annonçant une forte mobilisation nationale dès lundi pour tenter de forcer le géant laitier à remonter ses prix d'achat.
"Après la déception de vendredi, une grosse mobilisation est en préparation dans l'ensemble des régions", a déclaré dimanche soir à l'AFP Xavier Beulin, président de la FNSEA, s'exprimant également au nom de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) et des Jeunes Agriculteurs (JA), à l'issue d'une concertation téléphonique entre les producteurs.
Quelques heures plus tôt, les trois organisations syndicales nationales avaient annoncé dans un communiqué le lancement lundi d'"un mot d'ordre national pour aboutir à un accord avec Lactalis" sur le prix du lait.
Une nouvelle réunion téléphonique doit avoir lieu lundi à 12h pour ""pour acter les différents rassemblements et sites qui feront l'objet d'actions", a indiqué M. Beulin.
Les actions des agriculteurs en colère pourrait notamment se traduire par des manifestations autour de différents sites de production de Lactalis, et devraient débuter lundi en fin de journée, indique le patron de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA).
Toutefois, certains producteurs ont décidé sans attendre d'aller faire des opérations de stickage des produits Lactalis dans certains points de vente et d'aller à la rencontre des consommateurs, a-t-il ajouté.
"Nous sommes très déçus du comportement de Lactalis, qui se dit prêt à participer aux négociations, mais qui à côté de ça ne propose que des prix dérisoires" au regard des moyens dont il dispose, avait déclaré dimanche midi la numéro deux de la FNSEA, Christiane Lambert.
Les agriculteurs "se sont sentis humiliés par tant d’arrogance" et "meurtris par cette incapacité du groupe Lactalis à sortir d’une relation moyenâgeuse entre un seigneur et ses serfs", ajoutait un communiqué commun des syndicats agricoles.
"Lactalis devra plier ou alors ça lui coûtera très cher", a pour sa part averti Philippe Jéhan, président de la FDSEA Mayenne.
- Lactalis silencieux depuis vendredi -
En élargissant le combat à l'ensemble du pays, les producteurs de lait cherchent à augmenter la pression sur Lactalis, resté silencieux depuis vendredi.
Depuis "personne n'a eu le moindre contact avec eux ou de nouvelles de leur part", a indiqué Xavier Beulin se déclarant "à la disposition" du groupe laitier "pour entamer de nouvelles négociations".
Le groupe laitier a proposé une augmentation de 15 euros la tonne de lait à compter du 1er septembre, soit environ 271 euros.
Cette proposition a été perçue comme un véritable camouflet par les agriculteurs, qui estiment leur coût de production à 300-320 euros au minimum la tonne.
Le médiateur du gouvernement avait lui fait une proposition à 280 euros la tonne, ce qui n'a pas été accepté par les producteurs de lait.
Ce chiffre de 280 euros correspond au prix pour les 5 derniers mois de l'année, ce qui sur l'année revient à rémunérer 272 ou 271 euros la tonne, a expliqué dimanche Sébastien Amand, vice-président de l'Organisation de producteurs Normandie Centre.
Or "pour ramener de la rentabilité, il faudrait 340" euros la tonne, selon Pascal Clément, président de la section laitière de la FRSEA du Grand Ouest.
Lactalis achète actuellement le lait à 256,90 euros la tonne, bien en dessous du prix payé par d'autres transformateurs comme Laïta et la société Silav (290 euros la tonne) ou la laiterie Saint-Père, filiale d'Intermarché (300 euros les 1.000 litres).
Un producteur sur cinq en France travaille pour Lactalis, soit 20% de la collecte française, ou 5 milliards de litres de lait collectés sur un total de 25 milliards produits annuellement.
Deux rounds de négociations menés avec Lactalis la semaine dernière se sont soldés par un échec et aucune nouvelle date de négociation n'est actuellement prévue.
Il n'est "pas possible de rester dans cette forme de mépris de la part de Lactalis", s'est indigné samedi M. Beulin.
Le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll a estimé pour sa part que Lactalis, numéro un mondial des produits laitiers, ne pouvait "pas payer le prix le plus bas en France", tout en reconnaissant que la gouvernement ne disposait d'aucun moyen pour forcer ce dernier à remonter ses prix.