La sidérurgie mondiale, après avoir surmonté sa pire crise il y a deux ans, s'inquiète aujourd'hui de l'impact des problèmes financiers et du ralentissement économique sur son activité, mais veut garder un "optimisme prudent" avec la poursuite de la croissance en Asie.
La Fédération mondiale de l'acier (WSA), réunie à Paris pour sa conférence annuelle, a annoncé qu'elle prévoyait une demande mondiale d'acier en hausse de 6,5% cette année et encore de 5,4% en 2012.
Cette demande mondiale devrait ainsi atteindre environ 1,4 milliard de tonnes en 2011, puis 1,5 milliard en 2012.
"Même si nous sommes prudemment optimistes pour la croissance et la demande d'acier l'année prochaine, cette prévision intervient dans un paysage économique très incertain", a toutefois prévenu d'entrée le directeur général de la WSA, Edwin Basson.
La demande d'acier avait bénéficié dans la première moitié de l'année de la reconstitution des stocks et des politiques de relance, mais "l'économie mondiale est maintenant entrée dans un nouveau paysage volatil", a observé Daniel Novegil, président du comité économique de la WSA, et PDG de Ternium, premier producteur sud-américain d'acier.
"L'activité mondiale s'est détériorée, principalement dans les économies développées: les problèmes financiers augmentent et la confiance des entreprises se refroidit", a-t-il résumé.
Le PDG du numéro un mondial ArcelorMittal, Lakhsmi Mittal, a aussi exprimé un "optimisme prudent". Mais il a ajouté qu'il y avait "de nombreuses variables" dans la situation actuelle et qu'il fallait être "vraiment prudent".
Jusqu'à présent, les chiffres de la production mondiale d'acier n'ont pas montré de signe clair de ralentissement. Toujours tirée par la Chine, qui produit la moitié de l'acier mondial, la production des huit premiers mois de 2011 était en hausse de 8,3% sur un an.
La WSA continue de tabler sur une demande d'acier soutenue par les pays en développement, et en particulier la Chine où la consommation d'acier devrait progresser de 7,5% cette année, puis de 6% en 2012 à 681,6 Mt.
La Chine sera ainsi largement au-dessus de son niveau d'avant-crise, tandis que dans les pays développés, la consommation d'acier restera en 2012 de 15% inférieure à son niveau de 2007.
Aux Etats-Unis, la consommation d'acier devrait rebondir de 11,6% en 2011 et de 5,2% en 2012. Dans l'Union européenne, la demande d'acier progresserait de 7% en 2011, puis de 2,5% en 2012.
Philippe Darmayan, président de la Fédération française de l'acier, a relevé qu'en France, "la demande ne montre pas de signes d'une brutale détérioration", avec des secteurs automobile, mécanique et de la construction "toujours actifs".
Pour le patron du groupe français Vallourec, Philippe Crouzet, "il faut retenir +prudent+ plus qu'+optimiste+" dans le contexte actuel.
"Il n'y a pas encore de constat général d'effondrement et de catastrophe", mais "il y a des craintes qui augmentent chaque jour avec le temps que prennent les différentes autorités publiques pour résoudre les problèmes", a-t-il relevé.
Le PDG de Saint-Gobain Pierre-André De Chalendar a estimé qu'il y avait "urgence pour les gouvernants à ramener la confiance".
Les producteurs d'acier restent aussi préoccupés par l'impact des prix des matières premières qui pèsent sur la rentabilité: "les marges se réduisent, c'est un vrai sujet de préoccupation", a ainsi noté M. Mittal.
Dans ce contexte, Philippe Varin, PDG du groupe automobile PSA Peugeot Citroën, a appelé les producteurs d'acier à "une relation étroite" pour s'inscrire dans "le défi de l'allègement" du poids des voitures.
Le ministre de l'Industrie Eric Besson a assuré que l'acier représentait "une industrie du futur" dans laquelle la France et l'Europe ont "un rôle à jouer".