La croissance en France devrait être plus faible l'an prochain qu'escompté par les favoris de la présidentielle, selon le Fonds monétaire international, ce qui risque de compliquer la tâche du futur chef de l'Etat pour respecter ses engagements de réduction du déficit public.
En publiant mardi ses prévisions semestrielles, le FMI s'est indirectement invité dans la campagne, à cinq jours du premier tour.
L'institution financière de Washington a relevé son estimation pour cette année, de 0,2% à 0,5%, c'est-à-dire autant qu'attendu par le candidat socialiste François Hollande et pas loin de l'objectif du président sortant Nicolas Sarkozy, qui table sur 0,7%.
Mais c'est pour l'an prochain que les choses se compliquent. Selon le FMI, la croissance resterait molle, à seulement 1%. C'est légèrement mieux que la moyenne de la zone euro (0,9%) mais moins bien que l'Allemagne (1,5%), première économie européenne et principal partenaire de la France.
Or, Nicolas Sarkozy et François Hollande ont tous deux bâti leur programme, ainsi que leur trajectoire de retour à l'équilibre des finances publiques, sur une hypothèse bien plus optimiste, de 1,7% de croissance en 2013. A compter de 2014, ils espèrent même un minimum de 2% par an.
Après la publication des chiffres révisés du FMI, le gouvernement a réaffirmé l'ensemble de ses prévisions de croissance et de déficit, tablant ainsi toujours sur une hausse du produit intérieur brut de 1,7% et un déficit ramené à 3% l'an prochain.
Les deux candidats semblent toutefois conscients de la fragilité de leurs prévisions. Alors que le socialiste plaide depuis longtemps pour une renégociation du pacte européen de stabilité budgétaire --par ailleurs salué par le FMI-- afin d'y ajouter un volet croissance, le candidat de l'UMP en appelle désormais à la Banque centrale européenne afin qu'elle donne un coup de pouce à l'activité.
L'ex-Premier ministre socialiste Laurent Fabius a reconnu mardi que "si jamais il y avait des chocs supplémentaires", il faudrait "évidemment en tenir compte".
Car une reprise moins vive risque fort de compliquer leur tâche pour ramener le déficit public de 4,4% ou 4,5% du produit intérieur brut (PIB) attendus cette année à 3% l'an prochain, comme les deux candidats s'y sont engagés auprès des partenaires européens de la France.
Loin des objectifs de réduction des déficits
Le Fonds pense d'ailleurs, dans son "Moniteur des finances publiques" également publié mardi, que le déficit public de la France devrait s'établir à 4,6% du PIB en 2012 et à 3,9% en 2013, loin de l'objectif de 3% fixé par le gouvernement. Les experts internationaux estiment que le pays n'approchera du seuil symbolique des 3% qu'en 2014.
Ces prévisions signifient que le futur président, quel qu'il soit, devra rapidement adopter un nouveau tour de vis budgétaire après l'élection du 6 mai.
De son côté, la dette publique de la France devrait passer l'an prochain le cap symbolique des 90% du PIB, à 90,8%, alors que tous les candidats espèrent la contenir en-deçà de ce seuil. Elle entamerait par la suite un lent reflux.
Mais la France fait partie des Etats où la stabilisation de la dette pourrait être mise en péril par le moindre "petit choc", notamment si les taux d'intérêt qu'ils versent pour emprunter devaient augmenter, prévient le FMI.
Si la situation s'est "stabilisée" depuis début janvier dans la zone euro et que l'activité envoie des "signaux encourageants", une reprise de la crise de la dette demeure un "risque majeur", insiste le Fonds.
Il appelle les pays membres de l'Union monétaire à trouver un équilibre entre le soutien à la reprise économique et la réduction des déficits, d'autant qu'une "plus grande consolidation budgétaire pèsera sur la croissance dans certains cas".
Ses experts relèvent que Paris a déjà fait des efforts sur les retraites, en repoussant l'âge de départ, mais expliquent que les pays riches doivent aussi relever le défi d'une maîtrise des dépenses publiques de santé.