François Hollande a sonné samedi les trois coups du 51e Salon de l'agriculture, ouvert à Paris dans un climat de crispation du monde agricole entre le mal-être des éleveurs, la guerre des prix avec la grande distribution ou les normes jugées trop lourdes.
Au ras-le-bol de la profession s'ajoute, pour le chef de l'Etat, une cote de popularité au plus bas et les mouvements d'humeur du moment, qu'il s'agisse de "bonnets rouges", de militants de la Manif pour tous ou de l'opposition susceptibles de faire entendre leur voix lors de ce grand rendez-vous populaire.
Installée jusqu'au 2 mars à la Porte de Versailles, la "plus grande ferme du monde" présente cette année plus de 4.000 animaux. Elle avait reçu l'an passé près de 700.000 visiteurs.
Arrivé sur place dès 07H00 pour la traite des vaches, le président de la République a été chaleureusement accueilli par un éleveur de Bergerac (Dordogne), qui lui a présenté une Blonde d'Aquitaine.
Il a ensuite entamé son parcours dans un climat serein, sans effusion mais sans hostilité, entouré de plusieurs ministres, dont Stéphane Le Foll (Agriculture) et Guillaume Garot (Agroalimentaire).
M. Hollande pourrait s'attarder sur place moins longtemps qu'en 2013, après son élection, ou en 2012, lors de sa campagne électorale, quand ses visites d'une demi-journée avaient pris l'allure des marathons chers à Jacques Chirac, le plus "fidèle" au Salon de tous ses prédécesseurs.
"C'est une visite de travail", dont l'objet est aussi de "prendre en compte les problèmes, de les régler", a déclaré le chef de l'Etat. Exprimant sa "fierté" de voir "autant de producteurs de qualité, d'éleveurs qui se dévouent pour leur métier", il a salué "un secteur d'excellence", "qui exporte considérablement, qui est reconnu partout dans le monde".
- "Le pacte, aussi pour les agriculteurs" -
Malgré le contexte morose, le président de la FNSEA, Xavier Beulin, a assuré à l'AFP aborder le rendez-vous de cette année "dans un état d'esprit positif", évoquant les "très bons échanges" des Etats généraux de l'agriculture, tenus la veille par le premier syndicat du secteur.
"Je suis de bonne humeur. Le climat est serein", a renchéri François Thabuis, président des Jeunes agriculteurs (JA). "On a un certain nombre de rendez-vous avec les services publics, c'est plus apaisé", a-t-il estimé.
Vendredi, le patron de la FNSEA avait évoqué un "ras-le-bol" généralisé en critiquant une accumulation depuis quinze ans de "beaucoup trop de contraintes qui pèsent sur les entreprises".
"Vous avez soulevé beaucoup d'espoirs, mais on a l'impression qu'ils ne sont pas récompensés", a reproché à François Hollande samedi Jean-Pierre Fleury, patron de la Fédération nationale bovine (FNB).
"Ce président, il fait plus de choses pour les profs que pour les agriculteurs", a regretté Simon, 14 ans, un fils d'éleveur parvenu à passer en force avec son taureau Rouge des Prés pour approcher le chef de l'Etat.
"Le pacte de responsabilité s'applique aussi à l'agriculture", a répondu M. Hollande en rencontrant dans la foulée des jeunes en formation.
Entre le monde agricole, dans sa diversité, et le pouvoir, les sujets de contentieux sont multiples. La redistribution des aides européennes de la PAC en faveur des éleveurs en difficulté irrite les céréaliers. L'écotaxe a été suspendue après la révolte bretonne mais le gouvernement n'a toujours pas garanti aux agricultureurs l'exonération qu'ils réclament.
Et c'est sans compter le serpents de mer des normes environnementales ou la guerre des prix entre enseignes de grande distribution qui étrangle les producteurs.
Cette année, le prix du lait revient d'ailleurs sur le devant de la scène alors que les cours ont flambé de près de 10% l'an dernier et que les éleveurs français n'en voient toujours pas la couleur.
Pour apaiser les tensions, le gouvernement a tenté d'apporter des réponses lors des États généraux de vendredi.
Dans les colonnes de la France Agricole, hebdomadaire prisé des agriculteurs, François Hollande a notamment promis de faciliter la création ou l'extension des élevages, comme c'est déjà le cas depuis le 1er janvier pour les porcheries.