PARIS (Reuters) - L'agence Fitch a annoncé mardi soir avoir placé la note "AA+" de la France sous surveillance négative, soulignant que la détérioration des perspectives économiques pèse sur les objectifs de consolidation budgétaire et de stabilisation du ratio de la dette.
Cette décision intervient quelques jours après celle de Standard & Poor's qui a confirmé vendredi la note AA de la France tout en abaissant sa perspective, de stable à négative.
Fitch précise avoir procédé à cette mise sous surveillance bien avant la date de révision prévue de la note de la France, fixée au 12 décembre, pour tenir compte du projet de budget 2015 du gouvernement qui revoit sérieusement à la baisse les ambitions françaises en matière de maîtrise des déficits.
Dans le projet de loi de finances, dont l'examen à commencé mardi à l'Assemblée nationale, l'objectif de 3% de déficit budgétaire n'est plus envisagé que pour 2017, avec un déficit budgétaire qui restera élevé (75,4 milliards d'euros après 87 milliards en 2014) et un déficit public qui devrait atteindre fin 2015 4,3% du PIB, à peine moins que celui maintenant prévu pour 2014 (4,4%).
"L'impact quantitatif des récentes réformes structurelles est (...) incertain, et selon Fitch ne semble pas suffisant pour renverser les tendances pour la croissance et la compétitivité à long terme", dit l'agence. En plaçant la note sous surveillance négative, il devient plus probable qu'elle soit abaissée lors de la prochaine revue de la situation.
"En conséquence nous pensons qu'il y a des risques baissiers sur le potentiel de croissance de la France à long terme."
Fitch juge toutefois que le risque sur les capacités de financement de la France est faible, compte tenue d'une maturité moyenne de sa dette de sept ans, de la faiblesse des coûts d'emprunt et de la flexibilité financière dont elle dispose.
DETTE "PARMI LES PLUS SÛRES AU MONDE"
Comme après la décision de S&P, le ministre des Finances Michel Sapin a pris acte de la décision de Fitch mais "réaffirme que la dette française est parmi les plus sûres et les plus liquides au monde".
"Dans une situation économique européenne difficile, le gouvernement maintient son cap", affirme-t-il, tout en reconnaissant que la croissance et l'inflation plus faibles que prévu en Europe ont pesé sur les déficits budgétaires du pays.
"Mais, dit-il, les textes financiers adoptés en Conseil des ministres, dont la discussion a commencé au Parlement, assurent la mise en oeuvre des engagements pris au printemps."
"Le gouvernement poursuit dans le même temps des réformes qui contribueront à augmenter le potentiel de croissance de l'économie", ajoute le ministre dans un communiqué.
Dans le détail, Fitch a revu en baisse ses prévisions à court terme de croissance du produit intérieur brut (PIB) de la France à seulement 0,4% pour 2014 et 0,8% pour 2015 dans sa dernière étude contre, respectivement, 0,7% et 1,2% auparavant.
Le gouvernement a retenu une croissance de 1% en 2015 comme hypothèse dans l'élaboration du projet de loi de finances.
Fitch s'attend à ce que le ratio de dette publique/PIB atteigne un pic deux années plus tard que prévu auparavant et à un niveau plus élevé de 99,7% en 2017, suivi d'une retombée plus lente, à 94,9% d'ici la fin de la décennie, au lieu d'un pic de 96% en 2015 et moins de 90% d'ici 2020, contre 93,5% en 2013.
Fitch prévoit désormais un déficit budgétaire plus important à moyen terme, à 3,3% du PIB en 2017, soit un dérapage de quelque 1,5 point de pourcentage par rapport à sa précédente prévision, alors que le gouvernement le prévoit à 2,8% à cette date.
La France est notée AA1 avec perspective négative par Moody's, la troisième grande agence de notation.
(Juliette Rouillon avec le bureau de Bangalore; édité par Henri-Pierre André)