Sommés par le gouvernement de s'entendre sur les prix du lait, producteurs et industriels français ont finalement réussi mardi à trouver un compromis pour le deuxième trimestre sur ce dossier qui alimente régulièrement la colère des éleveurs.
"Il y a eu un accord de l'interprofession" (entreprises, coopératives et syndicat, ndlr), a annoncé le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire, à la surprise générale, à l'issue d'une réunion avec la filière au ministère. Cet accord, qui porte sur les prix du lait applicables du 1er avril au 30 juin, vise aussi à trouver une solution à plus long terme.
Industriels et producteurs étaient engagés depuis une dizaine de jours dans un nouveau bras de fer, les premiers bloquant les négociations sur les prix du lait tant que n'étaient pas pris en compte dans la nouvelle grille, les tarifs pratiqués en Allemagne.
Moins cher, le lait allemand pose de sérieux problèmes de compétitivité aux industriels français alors que les producteurs, dont les revenus annuels ont chuté de plus de moitié en 2009 pour atteindre les 9.000 euros, bien en-dessous du Smic, n'étaient pas en mesure d'accepter une baisse des prix.
Cet accord "est une bonne nouvelle (...) un signe positif", s'est félicité le ministre, qui voulait débloquer la situation, alors que les éleveurs manifestaient déjà depuis plusieurs jours dans certaines régions.
Avant même le début de la rencontre, il avait tapé du poing sur la table, demandant un compromis dans la journée sur la base de l'accord signé par la profession en juin.
L'ensemble de la profession s'est félicitée de ce compromis, chacun ayant obtenu une réponse à ses préoccupations respectives.
Cet accord comprend deux volets. Au 2ème trimestre, les producteurs vont être payés au prix prévu dans l'accord de juin, comme ils le souhaitaient.
La hausse devrait être en moyenne de 9 à 10%, a précisé Henri Brichart, président de la Fédération nationale des producteurs laitiers (FNPL), branche de la FNSEA, principal syndicat agricole français.
Puis l'interprofession va ouvrir des négociations pour fixer trois "indices complémentaires" pour définir à l'avenir les prix. Les tractations doivent aboutir le 31 mai afin qu'une nouvelle grille soit prête pour le 3e trimestre.
Le premier indice prendra en compte l'écart de prix entre le lait français et allemand, ce que réclamaient industriels et coopératives. Les producteurs ont obtenu la mise en place d'un indice des coûts de production du lait, une donnée très mal connue. Un troisième indice doit tenir compte des cours mondiaux des produits industriels (beurre et poudre).
Olivier Picot, président de la Fédération nationale des industries laitières (FNIL), a expliqué avoir signé ce compromis car il avait obtenu "en contrepartie" l'ouverture de négociations sur le différentiel entre la France et l'Allemagne.
"Sur le court terme, ce compromis doit calmer les producteurs", a estimé pour sa part M. Brichart.
Le président de la FNSEA, Jean-Michel Lemétayer, a aussi assuré que les producteurs de lait n'avaient "plus de raison de manifester".
Ce n'est pas l'avis des organisations minoritaires, non invitées aux négociations, qui ont désavoué cet accord, estimant qu'"il ne réglait pas le problème".
Mardi, des éleveurs du Nord/Pas-de-Calais ont mené des actions dans des grandes surfaces de la région. Lundi soir, des agriculteurs de Picardie avaient déversé du lisier et du fumier devant la préfecture à Beauvais.
L'Association des producteurs de lait indépendants (APLI) prévoit toujours un épandage de lait dans le centre de Nantes jeudi et un rassemblement de femmes et d'enfants de producteurs samedi à Poitiers.