par Sophie Louet
PARIS (Reuters) - François Fillon, investi dimanche à une écrasante majorité candidat de la droite et du centre pour la présidentielle de 2017, a lancé un appel "à tous ceux qui veulent servir" la France pour mettre un terme à un quinquennat "pathétique".
Désigné par près de 67% des électeurs de la primaire, un scrutin inédit à droite couronné de succès (près de 9 millions de votants), l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy a affirmé sa volonté de "vaincre l'immobilisme et la démagogie" de la gauche et du Front national, pas leurs électeurs.
Son adversaire du second tour, l'ancien Premier ministre chiraquien Alain Juppé est défait avec un peu plus de 33% des suffrages : il a annoncé son intention de se consacrer, à 71 ans, à la mairie de Bordeaux.
Une éclipse de la scène politique nationale qui fait suite au retrait de Nicolas Sarkozy, éliminé au premier tour, et achève de tourner une page pour la droite française.
François Fillon, 62 ans, l'éternel "numéro deux" propulsé aux premiers rangs contre tous les pronostics, a dit avoir "une pensée particulière" pour Nicolas Sarkozy, qui avait appelé à voter pour lui, et a adressé "un message d’amitié, d’estime, de respect" à Alain Juppé.
"Je veux lui dire (...) combien je compte sur lui pour nous aider dans cette bataille qui commence", a dit le député de Paris à la suite d'une poignée de mains avec le maire de Bordeaux au siège de la Haute autorité de la primaire.
L'HEURE DU RASSEMBLEMENT
Dès lundi commence la campagne du candidat de la droite et du centre pour la présidentielle, alors que François Hollande et Manuel Valls entretiennent le suspense sur leurs intentions.
François Fillon s'est présenté comme le héraut de la "vérité", de la "liberté" et des "valeurs françaises", porté par la "révolte" et les "espoirs" de "millions" de Français.
"Je relèverai avec eux un défi original en France : celui de la vérité et celui d’un changement de logiciel complet".
"Ces valeurs, je les défendrai et nous les partagerons avec tous ceux qui, dans leurs différences, aiment la France. Personne ne devra se sentir exclu d’une société que je veux plus juste et plus solidaire", a lancé celui que ses détracteurs, y compris à droite, accusent d'être ultra-libéral et rétrograde.
Sous le sceau de la réconciliation entre François Fillon et Alain Juppé, après un entre-deux-tours tendu, les différentes sensibilités de la droite et du centre se sont engagées dès dimanche soir à se rassembler pour porter cette "espérance".
Ralliement symbolique, Jean-François Copé, ennemi intime de François Fillon depuis l'élection contestée à la présidence de l'UMP en 2012, a été l'un des premiers à le féliciter pour "une magnifique victoire". "Je serai à ses côtés avec toute la famille rassemblée", a-t-il dit sur France 2.
"J'aurais préféré 52-48. A près de 70%, c'est que la capacité de rassemblement de François Fillon ne peut pas être mise en cause", a concédé le député Benoist Apparu, soutien d'Alain Juppé.
"Avec une belle primaire, un beau rassemblement, on peut limiter le Front national", a-t-il ajouté sur France 2.
"Marine Le Pen a raison de s'inquiéter. Nous ferons reculer le Front national. Pourquoi? Parce que la droite jusqu'à présent refusait de s'assumer", a commenté pour sa part le sénateur LR Bruno Retailleau, proche de François Fillon.
BAYROU LAISSE PLANER LE DOUTE
Alain Juppé et son équipe ont toutefois fait valoir qu'ils "continueraient à défendre leurs positions", celles d'un "libéralisme humaniste" pour reprendre les termes du maire de Bordeaux.
"Pour apaiser et réconcilier, il faut aussi donner une espérance. Il faut mettre sa force au service de la générosité, du respect mutuel, de la justice", a-t-il déclaré à son QG de campagne, dans une adresse aux jeunes militants. "Travaillez à redonner un sens à l'Europe", a-t-il ajouté dans un message implicite au séguiniste François Fillon.
Au centre, le président de l'UDI Jean-Christophe Lagarde, qui s'était engagé aux côtés d'Alain Juppé, a amorcé un rapprochement avec François Fillon en vue d'un "projet législatif commun".
Hervé Morin, président du Nouveau Centre qui soutenait au premier tour Bruno Le Maire, désormais rallié à François Fillon, a exhorté "les élus et les militants de l’UDI à tous s’engager dans cette campagne qui s’annonce difficile."
Le président du MoDem François Bayrou, qui soutenait Alain Juppé, a laissé planer le doute dimanche soir sur ses intentions pour la présidentielle en affirmant dans un communiqué que le programme de François Fillon laissait en suspens des "questions (qui) devront trouver réponse".
(Avec Simon Carraud, édité par Yves Clarisse)