(Reuters) - La banque centrale de Russie, qui s'efforce de gérer les conséquences des sanctions occidentales après l'invasion de l'Ukraine, a fortement relevé lundi son principal taux directeur après avoir annoncé dimanche un ensemble de mesures visant à soutenir les marchés.
Face à la dépréciation du rouble et à la hausse probable de l'inflation, la banque centrale russe a relevé son taux directeur à 20% contre 9,5% et a ordonné aux entreprises russes de vendre 80% de leurs devises étrangères.
"L'environnement extérieur de l'économie russe a radicalement changé", a prévenu la banque centrale dans un communiqué.
Dimanche, elle avait déjà annoncé qu'elle reprendrait ses achats d'or et assouplirait les restrictions sur les positions ouvertes en devises étrangères des banques.
Elle a également élargi la gamme de titres pouvant être utilisés comme collatéral pour obtenir des prêts et a ordonné aux opérateurs de marché de rejeter les ordres de vente de titres russes émanant des clients étrangers.
Ces mesures surviennent après l'annonce samedi par les pays occidentaux d'un durcissement de leurs sanctions contre la Russie, pour exclure plusieurs banques russes du système interbancaire international Swift et limiter l'accès de Moscou à des réserves de changes estimées à 630 milliards de dollars, un trésor de guerre susceptible de lui permettre de limiter l'impact des sanctions.
Les nouvelles sanctions risquent d'avoir un effet dévastateur sur l'économie russe et de compliquer l'accès des banques et entreprises russes au système financier international.
Le rouble s'est déprécié de près de 30% pour atteindre son plus bas historique face au dollar lundi.
RUÉE SUR LES DISTRIBUTEURS DE BILLETS EN RUSSIE
Les Russes se sont rués dimanche sur les distributeurs automatiques, redoutant des pénuries de liquidités et des perturbations dans les systèmes de paiement.
"Un 'bank run' ('ruée sur les banques') a déjà commencé en Russie durant le week-end (...) et l'inflation va immédiatement fortement augmenter et le système bancaire russe risque d'être en difficulté", estime Jeffrey Halley, analyste chez OANDA.
Les analystes de Nomura soulignent que les nouvelles mesures de rétorsion des pays occidentaux contre la Russie sont susceptibles d'avoir des implications plus larges à travers le monde.
"Ces sanctions de l'Occident devraient finir par nuire aux exportations de la Russie, ce qui pèsera aussi sur les perspectives de croissance des partenaires commerciaux de la Russie, notamment en Europe, et entraînera une hausse des tensions inflationnistes et des risques de stagflation", écrivent les analystes dans une note.
BP (LON:BP) a décidé de renoncer à sa participation dans le géant pétrolier russe Rosneft, mettant fin à trente ans d'activités en Russie.
Il s'agit de la décision la plus importante prise par une entreprise occidentale en réponse à l'invasion de l'Ukraine par les forces russes.
Rosneft représente environ la moitié des réserves pétrolières et gazières de BP et un tiers de sa production. La cession de cette participation de 19,75% devrait coûter à BP quelque 25 milliards de dollars (22,4 milliards d'euros).
Selon la Banque centrale européenne, plusieurs filiales européennes de la banque russe Sberbank devraient faire faillite.
La banque centrale russe, qui cherche à maintenir la stabilité financière, a indiqué que les clients des banques visées par les sanctions ne pourraient pas utiliser leurs cartes bancaires en dehors de la Russie et que les cartes émises par ces banques ne fonctionneraient pas avec Google (NASDAQ:GOOGL) Pay ou Apple (NASDAQ:AAPL) Pay.
(Reportage Bureau de Moscou, rédigé par Paritosh Bansal etShri Navaratnam, version française Camille Raynaud et Matthieu Protard)