Le chômage a franchi pour la première fois le seuil des 13% en Italie en février et la tendance demeure ancrée à la hausse pour les mois à venir, accroissant encore la pression sur Matteo Renzi, à la tête du gouvernement depuis à peine six semaines.
Le taux de chômage s'est inscrit en légère hausse par rapport à janvier (12,9%), selon une estimation provisoire publiée mardi par l'Institut national des statistiques italien (Istat).
L'Italie se classe ainsi parmi les plus mauvais élèves de la zone euro où le taux de chômage moyen est nettement plus faible (11,9%) et le nombre total de chômeurs plutôt orienté à la baisse. Le chômage a ainsi reculé en février dans des pays comme l'Irlande et le Portugal. L'Italie pour sa part compte aujourd'hui 3,307 millions de personnes en quête d'emploi, en hausse de 0,2% par rapport à janvier et de 9% sur un an (+272.000 personnes).
M. Renzi lui-même l'a reconnu aussitôt, qualifiant les statistiques de "bouleversantes". "En un an, nous avons perdu mille emplois par jour", a-t-il ajouté en référence à la baisse parallèle du nombre d'actifs dans le pays (-365.000 postes en février sur un an, à 22,216 millions).
"Il y a des signes de reprise mais qui ne sont pas suffisants", a-t-il dit, selon des propos rapportés par les médias italiens depuis Londres où il se trouve en visite. "C'est le moment de se remettre à courir", a-t-il lancé, fidèle à sa réputation d'homme pressé.
"Les chiffres du chômage ne sont pas bons, c'est certain", souligne Pietro Reichlin, qui enseigne la macroéconomie à l'université Luiss de Rome. En soi, la nouvelle progression du chômage n'est cependant pas une surprise, explique-t-il à l'AFP: "Il y a toujours un décalage entre la reprise économique et celle de l'emploi après une crise".
Le PIB italien a progressé de 0,1% au 4è trimestre 2013, après avoir enchaîné 9 trimestres de contraction, soit la plus longue récession de l'après-guerre pour la péninsule, qui s'est accompagnée d'une nette montée des tensions sociales.
M. Renzi "fait face à un grand défi, qu'il tente d'affronter", souligne-t-il, évoquant le projet de réforme du marché du travail, le "Jobs act", qui prévoit entre autres une simplification de l'apprentissage et l'allongement à trois ans des contrats flexibles à durée déterminée.
- Un jeune sur dix en quête d'emploi -
Cette réforme devrait entrer en vigueur d'ici trois mois, estime M. Reichlin. Si ses effets sont attendus globalement "à moyen ou long terme", ils pourraient être un peu plus rapides pour l'emploi des jeunes, principales "victimes" de la crise, estime-t-il.
Selon l'Istat, le taux de chômage des jeunes actifs de 15-24 ans s'est établi à 42,3% en février, soit un cheveu en dessous de son niveau record de janvier (42,4%), mais plus du double de celui de début 2008. En zone euro, seules la Grèce et l'Espagne ont aujourd'hui des taux plus élevés que l'année précédente.
Le nombre de jeunes chômeurs s'est établi à 678.000 personnes en février: plus d'un jeune sur dix (11,3%) de cette tranche d'âge est ainsi en quête d'emploi, souligne Istat.
Parmi les autres "signaux négatifs" qui transparaissent dans les statistiques du jour, Paolo Mameli, économiste de la banque Intesa Sanpaolo, pointe aussi le "plus bas historique" atteint par le taux d'occupation à 55,2%.
Lui non plus ne s'attend pas immédiatement à un retournement de tendance étant donné le stade encore "embryonnaire" de la reprise de l'économie italienne. Les enquêtes de confiance les plus récentes, surtout celle sur le moral des ménages, ont montré de nettes attentes d'embellie en matière d'emploi, mais qu'il est trop tôt pour traduire en termes réels, explique-t-il.
"Dans le meilleur des cas, étant donné que la +très modeste+ reprise du PIB n'a commencé qu'au 4è trimestre 2013, on pourrait avoir une légère baisse du chômage au cours du deuxième semestre 2014", estime-t-il.