par Kirsti Knolle et Eva Taylor
MANNHEIM, Allemagne (Reuters) - L'indice ZEW mesurant le moral des investisseurs et analystes allemands est tombé ce mois-ci en territoire négatif pour la première fois en deux ans, une donnée qui suggère que la première puissance économique européenne souffre de crises à l'étranger et de la conjoncture déprimée, aussi bien au niveau national qu'européen.
L'institut ZEW, basé à Mannheim, a annoncé mardi que son indice avait reculé pour le dixième mois d'affilée pour tomber à -3,6 en octobre, son plus bas niveau depuis novembre 2012.
C'est bien plus mauvais qu'attendu, les économistes interrogés par Reuters tablant en moyenne sur un indice à 1,0.
La statistique a propulsé les futures sur Bunds à leur plus haut du jour tandis que le rendement de l'emprunt allemand touchait un plus bas record et que l'euro repartait à la baisse.
Jennifer McKeown, économiste pour l'Europe chez Capital Economics, rappelle que l'indice ZEW est généralement précis pour indiquer des retournements de cycles économiques.
Conjugué à l'annonce au même moment d'une chute de 1,8% de la production industrielle de la zone euro en août, il fait selon elle redouter une nouvelle récession.
"Cela va intensifier la pression sur la BCE pour qu'elle mette en oeuvre un vaste programme d'assouplissement quantitatif au moment même où les autres grandes banques centrales s'apprêtent à remiser leurs politiques de soutien à l'activité", note-t-elle.
DOGMATISME BUDGÉTAIRE
Le mauvais indice ZEW d'octobre vient s'ajouter aux statistiques de la semaine dernière montrant des baisses des exportations, des commandes et de la production industrielles allemandes sans précédent depuis 2009, au plus fort de la crise financière mondiale.
Après une forte croissance sur les trois premiers mois de 2014, l'économie allemande s'est contractée de 0,2% au deuxième trimestre et certains économistes redoutent désormais une récession technique, définie par deux trimestres consécutifs de contraction du produit intérieur brut (PIB).
Le gouvernement doit publier dans la journée ses prévisions de croissance actualisées. Une source de la coalition au pouvoir a indiqué que la prévision pour 2014 et 2015 serait revue à environ +1,25%. Le gouvernement tablait jusqu'ici sur +1,8% et +2,0% respectivement.
Clemens Fuest, le président de l'institut ZEW, a dit ne pas exclure une nouvelle contraction de l'économie allemande en juillet-septembre, tout en ajoutant ne pas s'attendre à une récession prolongée du fait notamment de la bonne tenue de la demande intérieure.
"On ne peut exclure que le troisième trimestre soit négatif mais la récession n'irait pas au-delà, en raison notamment des solides fondamentaux économiques de l'Allemagne", a-t-il dit.
Si les tensions en Ukraine pèsent sur les exportations, la reprise en cours aux Etats-Unis apporte de l'espoir "si bien que la situation n'est pas aussi mauvaise que certains le pensent actuellement", a-t-il souligné.
L'Allemagne se voit reprocher par ses partenaires européens de concentrer tous ses efforts sur son objectif d'un budget à l'équilibre l'an prochain alors même que son économie montre des signes de faiblesse et que la zone euro bat de l'aile.
Clement Fuest a reconnu que s'accrocher à cet objectif ne constituait pas le meilleur signal à donner à l'Union européenne et pouvait être perçu comme une attitude dogmatique.
(Benoît van Overstraeten et Véronique Tison pour le service français)