Prime à la première embauche, indemnités prud'homales plafonnées, gel des seuils fiscaux, CDD renouvelables deux fois: Manuel Valls a annoncé mardi un "Small business act à la française" qui doit créer "plusieurs dizaines de milliers d'emplois" dans les petites et moyennes entreprises (PME).
Ces 18 mesures ont suscité des réactions partagées, aussi bien au sein du patronat que dans les rangs socialistes. M. Valls les a d'ailleurs défendues devant les députés PS après les avoir présentées à la presse, appelant à un "débat pragmatique".
L'ambition du plan est de "simplifier", "sécuriser", "créer ce mouvement pour l'embauche" dans les PME, notamment les plus petites, qui sont "le principal gisement d'emploi dans notre pays", a déclaré le Premier ministre à l'issue d'un conseil des ministres restreint à l’Élysée.
La France compte plus de trois millions de petites et moyennes entreprises (de moins de 250 salariés), qui concentrent près de la moitié de l'emploi salarié.
Il a évoqué un "small business act à la française", en référence à une loi américaine votée dans les années 1950 pour soutenir les PME.
"C'est en s'appuyant sur ces forces vives, a-t-il poursuivi, que nous pourrons amplifier la croissance et faire baisser le chômage", qui a atteint un nouveau record fin avril selon Pôle emploi (3,536 millions de chômeurs en métropole).
Pour y parvenir, une "aide exceptionnelle" de 4.000 euros va être immédiatement créée et versée aux entreprises sans aucun salarié (environ 1,2 million) qui effectuent leur première embauche.
Cette prime, de 2.000 euros la première année et 2.000 euros la seconde, sera versée pour tous les CDI et CDD de plus de 12 mois signés d'ici au 8 juin 2016, selon Matignon. Sont concernées les entreprises n'ayant jamais eu de salarié ou n'en ayant pas eu depuis au moins 12 mois.
Cette mesure "permettra de créer de 60.000 à 80.000 emplois", affirme le ministre de l’Économie, Emmanuel Macron.
Le gouvernement va également plafonner les indemnités prud'homales accordées aux salariés licenciés sans cause réelle et sérieuse.
Ce plafonnement, qui sera ajouté au projet de loi Macron qui doit être adopté d'ici à fin juillet, variera selon la taille de l'entreprise et l'ancienneté du salarié licencié; il ne concernera pas toutefois les grandes entreprises et les "atteintes graves au droit du travail", comme les discriminations ou le harcèlement.
- "Plusieurs dizaines de milliers d'emplois" -
Autre mesure: le gel pendant trois ans de l'effet des franchissements des seuils fiscaux jusqu'à 50 salariés. Ces seuils d'effectifs déclenchent des prélèvements fiscaux et sociaux supplémentaires pour les entreprises.
Toujours sur les seuils fiscaux, tous ceux franchis au 9e ou au 10e salariés (notamment formation professionnelle et versement transport) seront relevés au 11e salarié.
Concernant le contrat de travail, Manuel Valls "a fait le choix de ne pas ouvrir le chantier du contrat à durée indéterminée (CDI)", mais il va assouplir les contrats à durée déterminée (CDD) et les contrats d'intérim. Ceux-ci pourront être renouvelés deux fois, au lieu d'une actuellement.
Cette mesure, que réclamait le patronat, se fera "sans bien sûr toucher à la durée maximale de 18 mois" prévue par la loi pour les CDD, a précisé le Premier ministre.
Le gouvernement a aussi annoncé la possibilité de poursuivre financièrement plus facilement l'entreprise dont le sous-traitant aura commis une fraude aux travailleurs détachés.
Il a enfin annoncé des mesures destinées aux demandeurs d’emploi: 40.000 formations prioritaires supplémentaires ciblées sur les métiers en tension dans les TPE et PME, doublement à 70.000 du nombre de chômeurs créateurs d’entreprises accompagnés par Pôle emploi, ou encore possibilité de remplacer gratuitement par des chômeurs de longue durée les salariés partis en formation.
A terme, selon Emmanuel Macron, ces 18 mesures aideront "à créer plusieurs dizaines de milliers d'emplois".
Côté patronat, si le Medef a salué de "bonnes initiatives" et la CGPME "de réelles avancées", l'UPA (artisans) a jugé qu'elles n'étaient "pas à la hauteur" et dénoncé un "saupoudrage de dispositions plutôt positives mais souvent complexes d’application ou limitées dans le temps, et manquant d’une véritable ambition".
Chez les syndicats, Force Ouvrière a estimé que le gouvernement poussait "un peu plus haut le curseur patronal" dans le cadre de sa politique "d'inspiration libérale".
La CFDT a jugé que les mesures étaient "en dessous des attentes" et a critiqué en particulier le plafonnement des indemnités prud'homales.
La CFE-CGC et l'Unsa ont appelé de leur côté les entreprises à passer à l'action.