PARIS (Reuters) - Les enseignants, qui étaient appelés à une seconde grève contre la réforme du collège, se sont faiblement mobilisés jeudi, alors que le dialogue de sourds se poursuit entre le gouvernement et les syndicats hostiles au texte.
Le taux de grévistes était de 11,90% dans les collèges, selon le ministère de l'Education. La première grève, le 19 mai dernier, avait mobilisé 27,61% des enseignants du collège, d'après les chiffres du ministère.
Le Snes-FSU, premier syndicat du secondaire, faisait état d'"un peu moins d'un enseignant sur trois" en grève dans les collèges. Il avait revendiqué "plus de 50%" de grévistes en mai.
A Paris, le cortège de manifestants a réuni entre 1.300 et 1.500 personnes, selon la préfecture de police, deux à trois fois moins que lors du rassemblement du 19 mai.
Les défilés de province ont eux aussi peu rassemblé. A Nantes, ils étaient trois fois moins nombreux avec seulement 200 personnes réunies devant la préfecture. A Lyon, 400 personnes ont manifesté contre 2.000 il y a un mois.
"La parution des décrets, dès le lendemain de la dernière manifestation, a certainement découragé un certain nombre d'enseignants moins habitués à la lutte", a dit Céline Pella (Snes-FSU), professeur de mathématiques dans un collège de Sainte-Luce-sur-Loire, près de Nantes.
L'intersyndicale Snes-FSU, Snep-FSU, FO, CGT et Sud continue de réclamer l'abrogation du décret et de l'arrêté dont la publication, le 20 mai, a été vécue comme "une provocation".
INTERROGATIONS SUR L'INTERDISCIPLINARITÉ
Les syndicats ont été reçus mercredi au ministère de l'Education pour discuter d'une première version de la circulaire d'application de la réforme, prévue pour la rentrée 2016, mais ils ont refusé d'entrer dans le vif du sujet.
"Je crois qu'il y a encore des malentendus, de la pédagogie à faire, des gages à apporter. J'ai dit aux organisations syndicales qui ont appelé à la grève que ma porte est ouverte, des réunions ont commencé à avoir lieu", a dit la ministre Najat Vallaud-Belkacem à la presse.
"Je souhaite vraiment que chacun soit autour de la table pour définir ensemble les conditions d'application de cette réforme et faire en sorte que tout le monde s'y retrouve."
Les organisations réaffirment dans un communiqué leur hostilité à un dispositif qui ne répond pas "aux véritables besoins du collège", qui engendre selon elles "davantage d'inégalités entre les élèves", et met "en concurrence personnels, disciplines et établissements".
La réforme inquiète les enseignants en raison notamment de "l'interdisciplinarité" prévue par le projet.
Les établissements disposeront d'une marge de manoeuvre de 20% sur le temps d'enseignement pour favoriser l'apprentissage de sujets "transversaux" (Enseignements pratiques interdisciplinaires, EPI), une plus grande autonomie dont les syndicats craignent qu'elle ne débouche sur un accroissement des inégalités entre les collèges.
Le Snalc, syndicat réputé à droite et lui aussi opposé à la réforme, ne s'est pas joint à l'appel de l'intersyndicale.
Il a lancé un préavis de grève pendant le brevet des collèges, les 25 et 26 juin.
L'intersyndicale entend "se déplacer dans les établissements" et "aller à la rencontre des parents d'élèves", d'ici la fin de l'année scolaire mais aussi à la rentrée, pour "rentrer dans les détails de cette réforme dangereuse pour les enseignants et pour les élèves", selon Céline Pella.
Frédérique Rolet, secrétaire nationale du Snes-FSU, a pour sa part prévenu que la mobilisation allait se poursuivre : "Nous regarderons si rien ne bouge d'ici la rentrée ce que nous proposerons parce que nous considérons que le dossier n'est pas clos", a-t-elle dit sur iTELE.
Près de trois enseignants du secondaire sur quatre se disent opposés à la réforme du collège, selon un sondage Ifop pour l'association SOS Education diffusé mardi. ()
(Sophie Louet, avec Grégory Blachier, et Guillaume Frouin à Nantes, édité par Yves Clarisse)