Le conflit social à la Fonderie du Poitou Alu (FDPA), né d'une discorde avec la direction qui voulait baisser les salaires de 25%, a connu son épilogue jeudi avec la validation par le tribunal de commerce de Nanterre de la reprise de l'entreprise, placée en redressement judiciaire.
Après sept semaines de grève totale à l'automne 2011 pour s'opposer au projet de baisse des salaires lancé par le propriétaire, le groupe de Clichy Montupet, l'entreprise était en redressement judiciaire depuis le 20 octobre.
Le fabricant de culasses automobiles, devenu terrain d'expression pour politiques de tous bords, a fait l'objet de cinq offres de reprise et d'un projet de plan de continuation par la direction. Il a finalement été attribué au groupe Saint Jean Industries, la seule offre maintenue.
A moins d'une semaine du scrutin présidentiel, le président-candidat Nicolas Sarkozy s'est rendu lundi sur le site d'Ingrandes (Vienne) pour annoncer avant les juges la reprise de la FDPA par l'équipementier automobile basé dans le Rhône.
C'est une "excellente nouvelle, qui couronne plusieurs mois d'efforts et d'engagement du gouvernement", a relevé jeudi dans un communiqué le ministre de l'Industrie Eric Besson.
Le ministère a rappelé que Renault - qui achète 80% de la production de la Fonderie, aux côtés de PSA (20%) - s'est engagé à augmenter ses commandes, de 520.000 culasses en 2012 à 1 million en 2015 "en rapatriant en France plusieurs modèles de culasses jusqu'ici produits à l'étranger" (Royaume-Uni et Bulgarie).
Renault a aussi accepté, selon le ministère, d'acquitter les deux-tiers des 20 millions d'investissements nécessaires sur le site tandis que le gouvernement a accordé au repreneur une aide de 8 M EUR pour "la mise en place d'équipements plus modernes et plus performants".
"C'est une bonne nouvelle quand on sait d'où on vient", s'est réjoui le représentant du personnel Eric Bailly, rappelant "qu'une liquidation avait été proposée en novembre".
"L'offre de Saint Jean Industries est sérieuse en termes de prix et de prévisions d'exploitation mais elle reste encore faible pour le désintéressement des créanciers qui seront nombreux à être lésés", a relevé le mandataire judiciaire de FDPA, Christophe Basse.
Saint Jean Industries est présenté par le juge-commissaire dans son avis comme un "groupe familial en fort développement par la qualité de ses technologi0es (....) qui dispose de 21 M EUR de fonds propres mais est fortement endetté". Ce juge observe que "le dossier FDPA a mobilisé beaucoup d'énergie et coûte au total fort cher à la collectivité".
Saint Jean Industries s'est engagé à reprendre l'intégralité des actifs de FDPA et à préserver 395 postes de travail sur 455.
Le plan de Montupet "avait la préférence" de Renault, et était "plus favorable aux créanciers", avait noté le juge-commissaire. Mais, avait-il déploré, le personnel le rejette à "une très grande majorité", et il n'est donc "pas viable".
Le procureur avait requis la cession à Saint Jean Industries.
Ce groupe, avec cinq pôles de métiers (châssis, moteur, roues, outillages, aéronautique) a réalisé en 2011 un chiffre d'affaires de plus de 177 M EUR. Il employait en 2010 plus de 1.400 salariés en Europe, en Asie et aux Etats-Unis.
En 2005, Saint Jean Industries avait racheté les fonderies Duranton à Vénissieux (Rhône) avant de les fermer en 2009, licenciant 108 salariés.
Constatant les engagements de Renault pour la FDPA, la maire PCF de Vénissieux Michèle Picard a dénoncé "les méthodes cyniques (...) du capitalisme financier" et invoqué la probable "amertume" des ex-Duranton.