Le vote sur l'ensemble du projet de budget pour 2015, mardi après-midi, devrait avoir des allures de bis repetita à l'Assemblée nationale, entre une majorité peu enthousiaste sur la quête de 21 milliards d'euros d'économies et une opposition critique de nouvelles hausses d'impôts.
Malgré les abstentions de 30 à 40 socialistes et d'une large majorité des écologistes mais aussi les suffrages contre du Front de Gauche et de la droite, le gouvernement espère encore obtenir une majorité étroite mais suffisante, autour de 270 voix, pour faire passer son texte en première lecture.
Sur les économies, le gouvernement n'a cessé de marteler qu'elles n'étaient pas aveugles et qu'elles préservaient les priorités telles que l'Education.
Lors de la discussion, les députés ont obtenu environ 800 millions d'euros de crédits supplémentaires, par exemple pour une rallonge d'emplois aidés ou pour un soutien à l'investissement des collectivités locales, qui seront compensés par autant d'économies dans les ministères pour respecter le niveau de déficit annoncé.
Construit sur l'hypothèse d'une croissance de 1% (après 0,4% cette année), le budget prévoit un déficit public en légère baisse, à 4,3% du PIB (contre 4,4% cette année), alors qu'initialement, il devait consacrer le retour sous la fameuse barre européenne des 3%.
Il y a près d'un mois, la contestation par des socialistes d'une politique économique jugée trop favorable aux entreprises et pas assez aux ménages ou aux investissements publics s'était traduite par 39 abstentions sur le volet recettes du budget, dont celles des ex-ministres Benoît Hamon et Aurélie Filippetti. Autrement dit dans la fourchette haute de la "fronde" mouvante des députés PS, mais sans retrouver le maximum de 41 atteint en juin sur le programme de stabilité budgétaire.
- 'Ne pas lâcher le morceau' -
Le vote de mardi continue une "séquence démarrée aux municipales" autour de la critique de l'application du Pacte de responsabilité, "exprimée dans des votes successifs", a jugé le frondeur Laurent Baumel.
Même si "tout n'est pas à rejeter dans ce que propose le gouvernement", a observé Pascal Cherki, autre socialiste critique, "on ne va pas lâcher le morceau", car il faut défendre "d'autres choix" et permettre que "l'expérience de la gauche au pouvoir soit réussie" d'ici 2017.
Comme les fois précédentes sur un texte marquant l'appartenance à la majorité gouvernementale, la quasi-totalité des députés du groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste, à majorité radicale de gauche, devrait donner son quitus.
Dans ce budget, a réaffirmé mardi le coprésident des députés écologistes, François de Rugy, il y a "des éléments qui vont dans le bon sens - baisse d'impôt pour les ménages, augmentation du budget de l'éducation...- et d'autres qui ne vont pas dans le bon sens comme la baisse du budget de l'écologie ou l'abandon de la taxe poids-lourds."
Le Front de Gauche reste profondément opposé à "une logique d'austérité".
A droite, l'UMP, "très très contre", et l'UDI reprochent au gouvernement d'augmenter encore taxes et impôts, notamment pour les classes moyennes, de ne pas faire de réformes structurelles pour dégager de "vraies économies" et de laisser filer les déficits.
Au-delà des critiques sur diverses taxes (hausse de la redevance de trois euros, de deux centimes du litre de gazole pour compenser en partie l'abandon de l'écotaxe, etc.), la droite martèle qu'elle ne croit pas à la promesse de François Hollande de ne pas recourir à l'avenir à des impôts supplémentaires après ce qu'elle considère comme "un couac" du secrétaire d'Etat au Budget, Christian Eckert.
Le gouvernement "continue dans les discours sans les actes", a lancé le nouveau président de l'UDI Jean-Christophe Lagarde, par ailleurs "ulcéré" par le récent cafouillage de l'exécutif sur les impôts.
Une fois terminées les navettes entre l'Assemblée et le Sénat, le vote final par le Parlement est prévu autour du 20 décembre. D'ici là, la Commission européenne, qui ne croit pas que la France tiendra son objectif de 4,3% de déficit public en 2015, donnera un avis plus précis sur le budget de Paris.
Par souci d'éviter une sanction de Bruxelles, le gouvernement a dégainé précipitamment des recettes supplémentaires de 3,6 milliards d'euros, qui seront examinées dans le projet de budget rectificatif 2014 en fin d'année.