Le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, a annoncé lundi un renforcement des sanctions contre les mauvais payeurs et une mise sous surveillance du secteur public pour réduire les retards de paiement envers les fournisseurs, fléau responsable de 15.000 défaillances d'entreprises par an.
"La diminution des retards de délais de paiement doit être une priorité", a déclaré M. Macron lors d'une conférence de presse.
Il a rappelé que ces retards représentaient "15 milliards d'euros de paiements décalés" et étaient responsables de "15.000 défaillances d'entreprises par an". Principales victimes de ce fléau, les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME).
"Aujourd'hui, on a des PME et des TPE (...) qui sont la principale banque de fait au bénéfice parfois d'autres PME, ETI (entreprises de taille intermédiaire, ndlr), de grands groupes ou parfois d'acteurs publics", a-t-il observé.
Dans ce contexte, le ministre a jugé "vital" d'agir pour "plus de transparence, plus de responsabilité collective, et des sanctions plus dures et transparentes lorsque les pratiques ne sont pas respectées".
Depuis 2009, les délais de paiement ne peuvent pas dépasser 60 jours à compter de la date de facture ou 45 jours après la fin du mois de livraison. Mais selon le cabinet Altares, le délai moyen de retard de paiement a atteint cette année 13,6 jours, soit deux jours de plus qu'il y a un an.
- "Politique de responsabilisation" -
Bercy a publié la semaine dernière les noms des cinq grandes entreprises condamnées à des amendes conséquentes pour des retards des paiements envers leurs fournisseurs: les opérateurs Numericable et SFR, ainsi qu'Airbus (PA:AIR) Helicopters ont écopé d'une amende de 375.000 euros, tandis que la société de charcuterie Paul Prédault s'est vue infliger une amende de 100.000 euros et la société de matériaux de construction Comasud une amende de 87.900 euros.
Ces décisions peuvent toutefois encore être contestées par les entreprises concernées.
Dans ce contexte, M. Macron a annoncé son intention de renforcer les sanctions, en portant le plafond des amendes de 375.000 euros à deux millions d'euros, une mesure qui figurera dans l'un des prochains textes législatifs présentés à la fin d'année ou au début de l'année prochaine.
Par ailleurs, l'administration pourra infliger plusieurs amendes aux entreprises coupables de multiples manquements. Ces sanctions seront en outre systématiquement publiées sur le site de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
Nommer publiquement les entreprises sanctionnées, méthode inspirée du "name and shame" pratiqué dans les pays anglo-saxons, "a ses vertus", a plaidé M. Macron, qui défend une "politique de responsabilisation".
Autre mesure, "le rapport de gestion des entreprises établira désormais les retards de paiement à la date de clôture des comptes, tant côté clients que fournisseurs", selon un dossier de presse de Bercy.
Le ministre a également annoncé la mise sous surveillance du secteur public. "Les mauvais payeurs sont aussi du côté public", a-t-il reconnu, indiquant notamment que certains ministères affichaient "une moyenne de 16 jours de retard".
Dans cette perspective, l'Observatoire des délais de paiement, dirigé désormais par Jeanne-Marie Prost, ancienne médiatrice nationale du crédit, sera élargi aux donneurs d'ordre publics. Les entreprises publiques pourront aussi être contrôlées par la DGCCRF, a indiqué M. Macron.
Enfin, la médiation interentreprises et la médiation des marchés publics seront fusionnées en une seule structure, la "médiation des entreprises", sous la houlette de l'actuel médiateur interentreprises Pierre Pelouzet.