La conférence européenne sur l'emploi, mercredi à Milan, risque d'être rapidement débordée par l'affrontement entre tenants et partisans de la rigueur budgétaire, avec le président français sur la défensive et le chef du gouvernement italien à l'offensive sur les réformes.
Une vingtaine de chefs d'Etat et de gouvernement sont attendus pour ce rendez-vous en théorie consacré au chômage des jeunes mais qui devra donner lieu à "un débat politique sur la situation économique", comme voulu par le président du conseil italien Matteo Renzi dans sa lettre d'intention à ses partenaires européens.
Alors que la présidence italienne de l'Union européenne avait parlé lundi d'une conférence de presse finale avec comme seul protagoniste l'hôte du sommet, l'Italie annonçait mardi que ce serait le trio Matteo Renzi, François Hollande et Angela Merkel qui répondrait aux médias.
Il semblait pourtant difficile ces derniers temps de réunir sur la même scène la chancelière allemande et le président français, tant les relations entre les deux pays semblaient tendues.
La raison principale ? Le fait que la Commission européenne puisse demander à la France de revoir son projet de budget 2015, qui prévoit un déficit à 4,3% du PIB, loin des 3% auxquels Paris s'était initialement engagé.
Or, à ce sujet, le président français pourrait ne trouver qu'un appui limité auprès du bouillonnant Matteo Renzi, 39 ans. Certes, le président du conseil italien plaide également pour une politique de relance de la croissance et un desserrement du carcan budgétaire européen en utilisant les flexibilités prévues par le Pacte de la stabilité. Mais dans son pays il s'en tient au respect scrupuleux du maintien du déficit en deçà des 3% du PIB, même si le seuil fixé par Bruxelles est selon lui "un paramètre dépassé".
Il espère aussi profiter de la présence à Milan de la plupart de ses partenaires européens - en l'absence notable du Premier ministre britannique David Cameron - pour annoncer l'adoption de son "Jobs Act", loi sur la réforme du marché du travail, preuve de sa capacité à mettre en oeuvre les réformes promises.
Le chef du gouvernement italien a précisé mardi qu'il entendait faire passer mercredi, via un vote de confiance au Sénat, sa réforme phare du droit du travail.
- Renzi en piste -
Dans un pays où le taux de chômage des jeunes atteint 44%, ce projet de loi est destiné à favoriser l'emploi, notamment à travers la réforme de l'article 18 du code du travail, qui protège les salariés contre les licenciements abusifs.
"Il n'y a pas d'emploi sans retour de la croissance. Il n'y pas de croissance sans emploi. Ces deux éléments sont très liés" entre eux, a asséné Matteo Renzi mardi devant la presse, en lançant: "demain (mercredi, ndlr), nous essaierons d'avancer dans ce sens".
Côte allemand, on approuve: "nous considérons très important que le gouvernement Renzi s'attaque (à la réforme du marché du travail, ndlr) et nous le soutenons".
Autant dire que François Hollande risque de se retrouver un peu seul, lui dont le pays semble incapable de se réformer, la récente grève des pilotes d'Air France en étant la dernière illustration.
Ces polémiques pourraient donc largement parasiter la conférence milanaise.
"Les questions de croissance et d'investissement seront au menu du conseil européen de fin octobre", insiste-t-on pourtant de source gouvernementale allemande, histoire de calmer les esprits.
Côte français, on se veut également tranquille: sur le sujet des différents dispositifs favorisant l'emploi des jeunes, "les Italiens nous soutiennent" et les Allemands "travaillent aussi pour qu'on puisse utiliser mieux et plus vite les fonds européens", assure-t-on.
Ces 6 milliards d'euros débloqués par Bruxelles sur deux ans (2014-2015) doivent servir à mettre en place "une garantie pour la jeunesse", adoptée en avril 2013, et fixant comme règle qu'aucun jeune de moins de 25 ans ne reste plus de quatre mois sans proposition (emploi, formation, stage) à la fin de sa scolarité ou en cas de perte d'emploi.