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St-Jean-de-Luz: les derniers pêcheurs de thon rouge face aux quotas européens et aux Espagnols

Publié le 05/05/2019 14:05
Mis à jour le 05/05/2019 14:48
St-Jean-de-Luz: les derniers pêcheurs de thon rouge face aux quotas européens et aux Espagnols

La bureaucratie des quotas européens, la concurrence des chalutiers espagnols: au port de Saint-Jean-de-Luz, dans les Pyrénées-Atlantiques, ils ne sont plus que deux à pêcher le thon rouge à la canne. Quatre, si on élargit le périmètre d'Hendaye jusqu’à Capbreton.

Didier Martinez est de ceux-là, l'un des derniers thoniers canneurs de la côte basco-landaise. Voilà trente-deux ans qu’il navigue, sur son bateau traditionnel basque de 15 mètres, tout en bois, baptisé Airosa.

"Je pense qu’on sera les derniers à faire ça ici, il n’y aura pas de relève. Il y a beaucoup trop de contraintes à pêcher le thon rouge à la canne", souffle Didier Martinez, assis dans la cabine de son bateau. Lui a un équipage de six hommes et écoule le produit de sa pêche exclusivement à la criée de Saint-Jean-de-Luz.

Pour le pêcheur, la saison du thon démarrera en juin et durera jusqu'à fin septembre. Quelques mois intenses où il laissera ses habituels maquereaux, chinchards ou anchois, pour prendre la mer tous les jours, dans l'espoir de faire bonne pêche dans une zone située au large, entre Bilbao et Arcachon.

Selon les quotas fixés par l'Union européenne, et alloué à l'organisation de pêche (OP) Pêcheurs d'Aquitaine, qui couvre les ports d'Hendaye à Arcachon, l'Airosa a droit à 18,5 tonnes de thon par saison.

"Les pêcheurs de thon de notre OP, sur toute la zone entre Hendaye et Arcachon, ont le droit à 160 tonnes de thon rouge. La moitié est pêchée à la canne et à la ligne, le reste, ce sont des chalutiers", explique David Milly, directeur de l'organisation de pêche aquitaine.

"On a dû faire face à une réduction des quotas depuis 2006, et même si depuis trois ans, les taux remontent, le plus gros des canneurs ne pêche toujours pas la moitié de ce qu'il pêchait", complète-t-il.

- "Une arête dans la gorge" -

"C’est un beau métier mais il a été cadenassé, c'est trop contraignant", regrette de son côté Didier Martinez. Lui se dit "fatigué" par l'ensemble des règles administratives qui ont accompagné la mise en place des quotas européens au début des années 2000.

Chaque poisson pêché doit être déclaré, pesé et le bateau peut faire l'objet de contrôles par les affaires maritimes, à son arrivée au port. "On a une marge d’erreur de 10% sur la déclaration. Quand vous avez 200 ou 300 poissons sur le pont, vous ne les pesez pas un par un. Donc on fait à l'oeil et parfois on se trompe : Il m'est arrivé de déclarer 5 tonnes alors que j'avais 5,3 tonnes, ou encore de dépasser la marge à 10,02 % et on s’en va au tribunal pour ça. Moi j’y suis allé trois ou quatre fois. Tout ça, c’est comme une arête qui se coince dans la gorge".

Didier Martinez, 49 ans, qui prendra sa retraite dans six ans après avoir débuté aux côtés de son père à quinze ans, sur le même bateau, ne conteste pas la nécessité de quotas pour préserver la ressource. Mais il estime que le déséquilibre est trop grand entre les armements (comprendre les bateaux) notamment avec les voisins espagnols. "En Espagne, il y a des grosses unités, des bateaux de 35 mètres avec 15 bonhommes dessus, ils rasent tout avec les filets qu’ils ont, ils font du mal".

Lui, n'a de toute façon ni les moyens ni l'envie de changer de bateau.

Pour David Milly, toutefois, la rareté du produit, induite par les baisses de quotas, l'ont rendu plus intéressant financièrement. Avec un prix au kilo situé entre 10 et 15 euros, le thon est un poisson qui se vend cher. " Il permet de pallier les réductions de quotas", assure le directeur de l'OP Pêcheurs d'Aquitaine.

Avant d'entamer une nouvelle saison du thon, "la plus belle des pêches, la vraie", Didier Martinez a quelques semaines pour préparer son bateau. Repeindre la coque, remplacer quelques planches. Puis il prendra la mer, encore une fois, dans ce fameux Golfe de Gascogne, en espérant remplir ses cales.

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