Par David Wagner
Investing.com - L'effondrement économique provoqué par la pandémie de coronavirus a poussé les gouvernements à déployer des programmes historiquement massifs de dépenses fiscales pour soutenir des millions de leurs citoyens et de leurs entreprises affectés par la crise de la pandémie de coronavirus.
Ces dépenses sont nécessaires pour soutenir les économies, il n’y a pas de doute là-dessus, mais le revers de la médaille est que la dette contractée via ces dépenses massives pourrait signifier qu’une crise de la dette suivra de près la crise du coronavirus.
C’est en effet l’avis de plusieurs économistes, dont ceux de l'Economist Intelligence Unit, qui ont écrit fin mars que "des crises de la dette pourraient se produire", relevant que « pour l'instant, les gouvernements augmentent leurs dépenses budgétaires pour lutter contre l'épidémie, maintenir l'architecture économique de base et garder les travailleurs dans leur emploi. En conséquence, les déficits budgétaires vont fortement augmenter dans les années à venir ».
Déjà au début du mois de janvier, avant qu'un pays n'impose un verrouillage des coronavirus, la Banque Mondiale avait mis en garde contre le risque d'une nouvelle crise de la dette mondiale. Elle a décrit la vague actuelle d'accumulation de la dette - qui a commencé en 2010 - comme "l'augmentation la plus importante, la plus rapide et la plus généralisée" des emprunts mondiaux depuis les années 1970.
Cette semaine, le Fonds Monétaire International a déclaré prévoir que l'économie mondiale subira "très probablement" cette année la pire crise financière depuis la Grande Dépression, alors que les gouvernements du monde entier prolongent les confinements et les arrêts économiques pour lutter contre la propagation du Covid-19. Le FMI s'attend maintenant à ce que l'économie mondiale se contracte de 3 % en 2020, contre une prévision d’une expansion du PIB mondial de 3,3 % en janvier.
La moitié du monde a maintenant demandé au FMI un renflouement, a déclaré mercredi la directrice de l'organisation, Kristalina Georgieva, à CNBC, ce qui donne une idée de la gravité de la crise économique.
Les pays d'Europe du Sud pourraient être les premiers concernés
Le soucis, c'est que les solutions qui seront à disposition des pays pour réduire leur dette après la crise du coronavirus seront peu nombreuses.
Si l'austérité a été utilisée pour réduire les déficits budgétaires élevés dans le passé, il est peu probable que cela s'avère viable lors d'une reprise post-crise, étant donné le niveau de traumatisme et de douleur économique que la plupart des pays du monde auront connu.
Quant à augmenter les recettes fiscales par le biais de taxes plus élevées, cela pourrait freiner la reprise et pourrait même ne pas être suffisant selon la plupart des économistes.
Mais surtout, nous pourrions voir s'affaiblir l'appétit des investisseurs pour une dette souveraine toujours plus importante.
Ainsi, en l'absence de mesures réalistes pour prévenir les crises de la dette souveraine, comme par exemple un début de mutualisation de la dette dans la zone euro (coronabonds ?), un second coup pourrait frapper les économies, et en particulier celles des pays développés très endettés comme l'Italie et l'Espagne.
C’est d’autant plus vrai que ces pays affichaient déjà des situations budgétaires très fragiles avant la pandémie de coronavirus, se remettant à peine de lourds programmes d’austérité, et que ce sont deux des pays les plus touchés au monde par le covid-19.
L’Italie et l’Espagne sont en effet les premier et deuxième pays affichant le plus grand nombre de cas de coronavirus après les USA, avec 182 816 et 165 155 cas de coronavirus à la date de jeudi, respectivement, selon le Johns Hopkins Coronavirus Resource Center. L'Italie a enregistré plus de 21.600 décès dus à la maladie, et l'Espagne en affiche plus de 19.100.
Pour résumer, les situations budgétaires de l’Italie et de l’Espagne devraient être pires que jamais à la sortie de la crise du coronavirus, ce qui pourrait entrainer le marché à attaquer leurs obligations, avec à la clé une hausse des coûts d’emprunt et un risque de contagion à d’autres pays de la zone euro.
Et compte tenu de la taille des économies italienne et espagnole, la crise de la dette qui se profile pourrait prendre une toute autre ampleur que la dernière crise de la dette de la zoen euro, lorsque la Grèce était au bord de la faillite en 2011-2012, sachant que des efforts considérables avaient été nécessaires pour éviter le pire.