Ultra-mobilisés, les syndicats d'Air France appellent à manifester jeudi à Paris contre le plan de restructuration de leur compagnie, qui doit être détaillé en comité central d'entreprise, le premier depuis les violences ayant marqué le CCE du 5 octobre.
A 9h00 doit s'ouvrir, dans le XVIe arrondissement, le Comité central d'entreprise au cours duquel la direction présentera "secteur par secteur, le nombre de postes censés être supprimés" d'ici à l'été 2017, selon Didier Fauverte, secrétaire (CGT) du comité d'entreprise.
A 13h00, les salariés sont, eux, appelés à se rassembler près de l'Assemblée nationale, "en uniforme", contre ce plan menaçant 2.900 emplois et pour soutenir cinq de leurs pairs poursuivis pour violences en réunion.
Ces cinq salariés sont soupçonnés d'être impliqués dans l'agression des deux dirigeants de la compagnie qui avaient fui des salariés en colère, chemises en lambeaux. Mis à pied sans salaire, ils seront jugés le 2 décembre.
Une large intersyndicale représentant les personnels au sol comme les navigants a appelé à la manifestation.
En sus, la CGT nationale a appelé "ses organisations à apporter leur soutien" et annonce des rassemblements "à Marseille, Bordeaux, Toulouse, Chartres...".
"Les salariés d'Air France devraient être en nombre, mais cela dépasse même Air France: nous avons eu des messages de salariés d'autres entreprises qui viendront", affirme Laurent Dahyot (CGT). "Ca devrait être l'événement de l'année", prédit Christophe Malloggi (FO).
La mobilisation, assortie de préavis de grève pour certains métiers et escales, ne devrait pas entraîner de grosses perturbations dans le ciel: la compagnie prévoit quelques "retards possibles", mais aucune annulation de vol.
Air France qui a déjà perdu 5.500 postes entre 2012 et 2014, est dans la tourmente depuis que direction et pilotes ont échoué à s'entendre sur un plan de productivité et de croissance, prévoyant que tous les navigants volent une centaine d'heures de plus par an.
Faute d'accord, la compagnie avait présenté au CCE du 5 octobre, un plan alternatif de "restructuration" menaçant 2.900 emplois (300 pilotes, 900 hôtesses et stewards, 1.700 au sol) sur 2016-2017.
Le PDG d'Air France-KLM, Alexandre de Juniac, a affirmé dimanche que la deuxième phase du plan, en 2017, pourrait être "évitée" si un accord intervenait sur de nouveaux efforts de productivité d'ici à début 2016. Mais la première phase est lancée, et les suppressions de postes qui vont avec, "moins d'un millier", a dit M. de Juniac.
- halte aux poursuites -
Des déclarations à la radio, quatre jours avant le CCE, qui ont soulevé la colère des syndicats d'Air France et des numéros un des deux premières confédérations, Philippe Martinez (CGT) et Laurent Berger (CFDT), chacun accusant en termes similaires la direction de jouer avec le feu.
Dans un courrier interne envoyé lundi aux salariés, dont l'AFP a eu copie, le président d'Air France, Frédéric Gagey, appelle à des "efforts partagés" : "chaque catégorie de personnel prendra sa part, la cohésion de l'entreprise est à ce prix", écrit-il.
Lundi, François Hollande a jugé possible "d'éviter les licenciements", via la négociation, sans évoquer le rôle que pourrait jouer l'État.
Mais pour les syndicats, les mesures de départs volontaires que la direction veut mettre en oeuvre en 2016 ne suffiront pas à résorber le sureffectif et n'empêcheront pas les licenciements.
Pour la CGT, "il faut que soient entendues les alternatives portées par les organisations syndicales d'Air France, aux licenciements envisagés". Le syndicat demande aussi "une table ronde avec l'État actionnaire" (à plus de 17%),
FO a appelé de ses voeux une "stratégie ambitieuse", accompagnée par "un État qui engage une politique volontariste de défense du transport aérien français face à la concurrence déloyale", en référence aux compagnies du Golfe.
Les représentants du personnel devraient voter jeudi en CCE pour enclencher une procédure de droit d'alerte.
L'intersyndicale réclame aussi "la levée des poursuites et des procédures disciplinaires engagées contre tous les salariés". Dix-huit procédures disciplinaires ont été lancées après les violences, selon M. de Juniac, avec pour sanction possible, mais pas la seule, le licenciement.