Les syndicats européens d'EADS, pour beaucoup inquiets de futures restructurations, convergent mardi vers Toulouse pour la réunion d'un comité européen du groupe, la première depuis que ses dirigeants ont annoncé son changement de nom en "Airbus Group".
En effet, le patron exécutif du groupe européen d'aéronautique et de défense, Tom Enders, a non seulement annoncé le 31 juillet qu'EADS allait prendre le nom d'Airbus, sa branche la plus connue et la plus prospère, mais il a aussi annoncé un regroupement des activités défense et espace pour améliorer sa compétitivité.
Le nouveau nom est bien accueilli par tous les syndicats français car "Airbus est symbole de réussite", mais le regroupement d'Astrium (espace) et de Cassidian (défense) alarme en France comme en Allemagne, d'autant que ces activités stagnent.
La direction, interrogée par l'AFP n'a pas souhaité communiquer sur le contenu de la réunion, renvoyant au dernier trimestre 2013 pour toute information.
Les cinq syndicats français (FO, CFE-CGC, CFTC, CGT, CFDT), interrogés par l'AFP, n'attendent pas mardi un plan précis lors de cette rencontre régulière avec la direction, mais ils se disent en accord avec le syndicat allemand IG Metall, pour que la volonté de rentabilité de la direction ne s'exerce pas aux dépens des salariés.
"EADS se veut entreprise normale, le poids des États s'est réduit et Enders vise une marge de 10% (elle était de 6,1% au 1er semestre 2013), mais on sera attentifs à ce que la capacité industrielle et pas seulement financière soit préservée", déclare Philippe Fraysse, conseiller au comité européen de Force Ouvrière (majoritaire en France chez Airbus).
Nommer un expert
"Les syndicats demanderont la nomination d'un expert mardi pour toute la durée de mise en oeuvre de la réorganisation, FO et IG Metall proposeront le cabinet Stratorg, qui a déjà travaillé avec nous", a précisé M. Fraysse.
La réunion de mardi "servira surtout à définir le calendrier des discussions" selon des sources syndicales concordantes, qui s'attendent à ce que les patrons des nouvelles divisions "remettent leur copie d'ici à fin 2013" sur les mesures précises.
M. Enders a promis fin juillet "des négociations avec les partenaires sociaux" pour que la nouvelle structure soit "totalement opérationnelle en juillet 2014".
Les avions Airbus (68.000 salariés) et Airbus Helicopters (22.400), nouveau nom d'Eurocopter, devraient être peu touchés, à la différence de la nouvelle division Airbus Defence and Space qui emploie le tiers du personnel (45.000) pour le quart du chiffre d'affaires (13,7 milliards d'euros sur 56,5 en 2012).
Chez Astrium (2.800 salariés à Toulouse, 7.000 en France, 17.000 au total), Jean-Pierre Queille, délégué CFDT, craint que les fonctions transversales (achats, finances, ressources humaines et informatique) soient les plus touchées.
La défense en première ligne
C'est chez Cassidian (28.000 personnes en Europe), que les inquiétudes sont les plus vives, pour l'Allemagne d'abord mais aussi pour la France (2.000 salariés).
"On a 3.400 produits différents pour la défense, la sécurité, avec des budgets militaires en baisse, il faudra savoir ce que la direction voudra garder ou céder", relève Philippe Fraysse (FO), qui s'oppose comme les autres syndicats à un projet déjà sur les rails de cession d'une des sociétés, "Tests et Services".
Pour Denis Jeambrun, représentant CFTC au comité européen, issu de Cassidian, "les entités les plus fragiles doivent être préservées par de nouvelles stratégies et investissements, même si certains doublons dans les structures peuvent être supprimés".
Jean-Jacques Desvignes (CGT), également de chez Cassidian, juge de son côté "particulièrement inquiétante la référence aux doublons par la direction, qui laisse prévoir une action à la hache".
Tous s'interrogent aussi sur la faisabilité du rapprochement entre le missile nucléaire stratégique français M-51, Airbus Military (A400M et l'avion de ravitaillements MRTT), et l'Eurofighter de Cassidian, qui repose principalement sur une base anglo-allemande.
Françoise Vallin, cadre d'Airbus et représentante CFE-CGC au comité européen, prévoit une "profonde restructuration sociale", mais espère que les discussions en cours en France pour renouveler les "accords de méthode EADS" sur le dialogue social permettront "d'éviter tout licenciement".