Le conseil d'administration d'Alitalia a approuvé vendredi à l'unanimité une manoeuvre financière de la dernière heure, alors que la compagnie aérienne, au bord de l'asphyxie financière, risquait de voir ses avions cloués au sol dès samedi.
Le plan approuvé par les administrateurs prévoit une augmentation de capital de 300 M EUR et de nouvelles lignes de crédit bancaires à hauteur de 200 M EUR, a indiqué Alitalia dans un communiqué. Les lignes de crédit existantes sont pour leur part confirmées.
Le groupe franco-néerlandais Air France-KLM, principal actionnaire de la compagnie avec 25%, a confirmé avoir lui aussi "approuvé ce plan d'urgence pour permettre à Alitalia de continuer à opérer", alors que son feu vert n'apparaissait pas certain en début de journée.
Toutefois, selon une source proche du dossier, cette approbation "ne préjuge pas de (sa) participation effective à l'augmentation du capital. L'engagement reste conditionné à la viabilité du plan de restructuration d'Alitalia." Le feu vert a été accordé pour éviter à Alitalia de voir ses avions ne soient cloués au sol dès samedi, a-t-on précisé.
Alitalia ne divulgue pas non plus les détails de la répartition de l'augmentation de capital entre la vingtaine de sociétés présentes à son tour de table, mais confirme que le groupe public Poste Italiane et les banques Intesa Sanpaolo et Unicredit pourront prendre en charge les options éventuellement non utilisées à hauteur de respectivement 75 M EUR pour la Poste et 100 M EUR pour les deux banques. Les actionnaires de la compagnie se prononceront lundi sur le plan.
Le patron du groupe pétrolier Eni, Paolo Scaroni, qui avait menacé en début de semaine de couper l'approvisionnement en carburant d'Alitalia, a pour sa part exprimé sa "satisfaction" à la nouvelle de l'accord : "Alitalia redevient pour nous un client important", a-t-il dit.
La compagnie avait initialement annoncé fin septembre une augmentation de capital beaucoup plus limitée, d'une centaine de millions d'euros, qui, bien que votée en conseil d'administration, avait été jugée insuffisamment ambitieuse et n'avait pas reçu l'assentiment d'une partie des actionnaires, notamment Air France-KLM.
Le gouvernement italien, très inquiet pour le sort d'Alitalia, entreprise emblématique, et celui de ses 14.000 salariés, après avoir exploré une série de pistes ces derniers jours, a finalement débloqué la situation jeudi en convaincant Poste Italiane de participer à l'opération.
Cette solution a cependant créé vendredi une polémique sur l'intervention de l'Etat italien dans une entreprise à 100% privée, après un premier sauvetage qui avait déjà coûté plusieurs milliards d'euros e, 2008.
Le patron des patrons Giorgio Squinzi a ainsi déclaré "être toujours très perplexe face à une intervention publique dans une société privée". "Si c'est un sparadrap pour soigner une situation d'urgence, d'accord. Mais il faudra réfléchir sérieusement une bonne fois pour toutes à un plan de moyen-long terme".
La solution a au contraire été saluée par le président l'Autorité italienne de l'aviation civile (Enac) Vito Riggio, qui avait lui-même évoqué jeudi une possible révocation de la licence d'Alitalia si une solution n'était pas trouvée dans les prochaines heures.
"Le gouvernement a accompli une chose très importante, il a réussi à trouver une solution dans un moment d'extrême difficulté pour le trafic aérien", a-t-il jugé.
Le ministre italien des Transports, Maurizio Lupi, a insisté sur le fait que le principal effort reposera sur les actionnaires privés de la compagnie et assuré que l'apport de Poste Italiane ne représente pas "une aide publique".
Il sera également limité, a-t-il insisté. "Le gouvernement et la Poste considèrent que les 75 millions d'euros sont le montant que l'entreprise peut investir. Nous ne pourrons pas intervenir ultérieurement", a-t-il prévenu.
Le gouvernement avait prévenu dès jeudi soir que l'aide fournie à Alitalia n'était pas "sans conditions" et exigé "une discontinuité et une stabilisation de son actionnariat, de même qu'une importante restructuration via un nouveau projet industriel".
Même si le plan de sauvetage est validé, la compagnie, chroniquement déficitaire, aura toujours besoin de s'adosser à un "partenaire étranger", a admis M. Lupi.
Du moins cette solution transitoire lui permet-elle de se présenter "en position de parité", a-t-il estimé. Pour l'heure, Air France-KLM est considéré comme "partenaire principal", a-t-il dit.