Confronté à un marché européen en berne, Renault entend supprimer 7.500 postes en France d'ici à 2016, soit plus de 15% de ses effectifs, mais sans fermeture de site ni plan de départs volontaires, contrairement à PSA, si toutefois un accord est trouvé avec les syndicats sur la compétitivité.
Alors que PSA va fermer une usine et supprimer plus de 11.000 postes, Renault choisit une méthode moins violente: en trois ans, la marque au losange veut passer de 44.642 salariés à 37.142, en misant essentiellement sur des départs naturels non renouvelés (5.700).
Pour les 1.800 postes restants, la direction propose d'élargir à tous les salariés un dispositif actuel de départs anticipés pour les fins de carrière.
Ce dispositif, jusqu'alors soumis à un critère de pénibilité, permettait aux seuls ouvriers et ETAM (employés, techniciens, agents de maîtrise) âgés d'au moins 58 ans, d'être dispensés d'activité jusqu'à l'âge de liquidation de leur retraite, avec une suspension de contrat rémunérée à 75% du salaire.
La direction a expliqué mardi aux syndicats lors d'une nouvelle réunion sur la compétitivité, qu'elle estimait que plus de 3.000 personnes pourraient potentiellement bénéficier de ce dispositif élargi, a rapporté Bruno Matthiez de la CFE-CGC, alors que les plus de 50 ans représentent plus de 37% des effectifs dans les usines françaises.
Sur les 7.500 postes supprimés, 2.000 le seront dans l'ingénierie, 1.300 dans le tertiaire, 4.200 dans les usines, selon Laurent Smolnik (FO) qui comme la CGT rapporte que la direction envisage en fait 8.260 suppressions postes et potentiellement 760 embauches.
A la clé: 400 millions d'euros d'économie sur les frais fixes, estime la direction qui pourrait ainsi, dit-elle, "retrouver des marges de manoeuvre pour investir et développer ses activités", et réaliser des "recrutements dont elle a besoin pour l'avenir".
Cela permettrait aussi d'"avoir une croissance de la production en France plus soutenue que celle du marché européen", espère Renault, dont les immatriculations ont chuté de 22,1% en 2012.
"C'est une catastrophe pour l'ensemble des catégories de personnels", a toutefois réagi Fabien Gâche (CGT). "On s'attendait à des annonces mais tout de même pas à ce point", a commenté M. Smolnik qui craint "des pertes de compétences".
"On attend des contreparties"
Dès le début des négociations, en novembre alors qu'un accord sur la compétitivité était signé en Espagne, la direction avait mis la pression sur les syndicats: pas de fermeture de site si un accord était trouvé avec eux.
Depuis, la direction déroule ses propositions (alignement du temps de travail pour tous les sites, mobilité obligatoire, "mutualisation" d'activités), tout en évoquant la possible venue de partenaires, comme Nissan et Daimler, sur des sites français.
"Je ne pense pas que la fermeture des sites soit quelque chose d'inéluctable", expliquait récemment à l'AFP la patron de Renault et Nissan, Carlos Ghosn, qui mise sur un accord en France dans les prochaines semaines.
"Si un accord était signé avec les organisations syndicales, ce redéploiement des effectifs ne nécessiterait ni fermeture de site, ni plan de sauvegarde de l'emploi, ni plan de départs volontaires", a confirmé mardi Gérard Leclercq, directeur des opérations France.
"On attend les contreparties, et ensuite on verra s'il y a matière à discuter", tranche M. Matthiez. "Nous voulons savoir ce que la direction met en face. Pour l'instant elle parle de la possibilité que des partenaires mettent des voitures dans nos usines, mais qui, quoi, comment, combien, où?", s'interroge-t-il.
Le précédent plan de réductions d'effectifs d'ampleur au sein du groupe remontait à fin 2008: 4.000 postes supprimés via des départs volontaires et environ 1.000 emplois dans ses filiales. En 1997, Renault fermait l'usine belge de Vilvorde (3.100 salariés) et supprimait environ 2.700 postes dans les usines françaises.