Deux ans jour pour jour après la faillite de la banque américaine Lehman Brothers, la Commission européenne a présenté mercredi des propositions législatives pour mieux réguler les produits dérivés et les ventes à découvert, mis en cause pendant la crise financière.
"C'est peu de dire l'importance des produits dérivés. Nous savons le volume des échanges -600.000 milliards de dollars-. Nous savons que ces échanges se déroulent dans une très large opacité, et nous voulons mettre de la lumière sur des gens qui n'en ont pas vraiment l'habitude. Mais nous allons le faire", a déclaré le commissaire européen chargé des services financiers, Michel Barnier, au cours d'une conférence de presse.
Bruxelles propose d'améliorer la transparence et la sécurité des transactions sur les produits dérivés de gré à gré au sein de l'UE, ces contrats financiers que s'échangent les investisseurs pour se couvrir contre des risques liés à la valeur future d'un produit (taux de change, taux d'intérêt, matière première...).
Ces marchés ont crû de manière exponentielle depuis une vingtaine d'années avec très peu de contrôles. Ils viennent d'être réglementés par les Etats-Unis, dans le cadre de la vaste réforme financière promulguée en juillet.
La Commission européenne s'y attaque à son tour, en proposant tout d'abord que ces transactions soient obligatoirement déclarées à des centres de conservation des données, auxquels les autorités de régulation européennes auront accès.
Ensuite, Bruxelles veut obliger les produits dérivés de gré à gré à passer par des chambres de compensation: ces organismes assurent le bon déroulement des opérations, et jouent le rôle de fonds de garantie pour éviter le risque de faillites en cascade.
L'exécutif européen propose que les institutions financières soient obligées d'y centraliser leurs opérations "normalisées", c'est-à-dire qui remplissent des critères d'éligibilité, comme un niveau élevé de liquidités.
Les entreprises non financières qui réalisent des opérations sur des dérivés (pour couvrir leurs risques de changes par exemple) ne seraient pas obligées, elles, de passer par des chambres de compensation, jusqu'à un certain seuil de transactions.
Dans une deuxième proposition, Bruxelles veut aussi mieux réguler les ventes "à découvert", qui permettent à des opérateurs de vendre des titres qu'ils ne possèdent pas encore, avec l'espoir de les racheter plus tard à un prix plus intéressant.
"Chaque vente à découvert sera identifiée", a souligné M. Barnier.
Bruxelles s'intéresse aussi aux ventes à découvert "à nu", particulièrement spéculatives, qui permettent à l'investisseur de vendre à terme un actif sans l'avoir emprunté avant ou s'être assuré de sa disponibilité.
La Commission propose d'obliger les opérateurs qui recourent aux ventes à découvert à nu sur les actions et les obligations d'Etat à donner des informations sur leurs positions de vente et à fournir des garanties qu'ils pourront livrer les titres qu'ils promettent.
Ces propositions doivent encore être discutées par les Etats de l'UE et le Parlement européen. La Commission espère une mise en place en 2012.