par Tarek Amara et Mohamed Argoubi
TUNIS (Reuters) - Au moins 17 étrangers, dont deux Français, et deux Tunisiens ont été tués mercredi à Tunis par des hommes armés qui ont ouvert le feu sur des touristes à leur arrivée devant le musée du Bardo, avant de s'y retrancher avec des otages.
Le président Béji Caïd Essebsi a imputé la responsabilité de l'attaque à des islamistes. "Deux ont déjà été identifiés. Nous savons que ce sont les extrémistes toujours, ce qu'on appelle Ansar al Charia, ce qu'on appelle les salafistes djihadistes", a-t-il déclaré sur France 24.
"C'est un acte sans précédent dans l'histoire de la Tunisie, c'est une catastrophe pour nous, nous avons eu beaucoup de victimes parmi les amis étrangers qui visitaient la Tunisie comme touristes", a ajouté le chef de l'Etat.
Deux Français ont trouvé la mort dans l'attaque et sept autres ont été blessés, dont l'un reste dans un état grave, a déclaré l'Elysée. Cinq Japonais, quatre Italiens, deux Colombiens, deux Espagnols, un Australien et un Polonais ont également péri, selon les autorités des pays concernés.
Deux heures après le début de l'attaque, les forces de l'ordre ont donné l'assaut. L'opération, qui a coûté la vie à deux assaillants et à un policier, a permis de libérer tous les captifs.
"Deux terroristes déguisés en militaires ont pénétré dans l'enceinte du Parlement, puis dans le musée où ils se sont attaqués aux touristes", a déclaré Habib Essid.
"Tous les Tunisiens doivent s'unir après cette attaque qui avait pour but de ruiner l'économie tunisienne", a-t-il ajouté.
RASSEMBLEMENT CONTRE LE TERRORISME
Dans la soirée, plusieurs centaines de Tunisiens se sont rassemblés dans le centre de la capitale en brandissant le drapeau national et en dénonçant le terrorisme.
Il s'agit de l'attentat le plus meurtrier commis contre des touristes en Tunisie depuis celui du 11 avril 2002 contre une synagogue de l'île de Djerba. Revendiqué par Al Qaïda, il avait fait 21 morts, pour la plupart des touristes allemands et français.
L'Union européenne a proposé son aide aux autorités de Tunis, par la voix de la Haute Représentante de l'UE pour la politique étrangère: "L'UE est décidée à recourir à tous les moyens à sa disposition pour soutenir pleinement la Tunisie dans son combat contre le terrorisme et la réforme du secteur de la sécurité", a déclaré Federica Mogherini.
Les Etats-Unis ont promis de "soutenir les efforts du gouvernement tunisien pour faire avancer une Tunisie sûre, prospère et démocratique".
Plusieurs organisations extrémistes, dont Ansar al Charia, sont apparues en Tunisie depuis la "révolution du jasmin" qui a mis fin au règne du président Zine ben Ali en janvier 2011.
Les autorités estiment en outre à 3.000 le nombre de Tunisiens qui ont rejoint les rangs de groupes djihadistes à l'étranger et craignent que certains ne rentrent pour commettre des attentats dans leur pays.
La "révolution du jasmin" a été le premier acte du "printemps arabe", mais la Tunisie a échappé au chaos qui a notamment gagné la Libye voisine.
Les autorités tunisiennes ont annoncé mardi le démantèlement de quatre cellules de recrutement djihadistes pour la Libye. Ahmed Rouissi, l'un des hommes les plus recherchés de Tunisie, qui commandait une unité de l'Etat islamique (EI) en Libye, a par ailleurs été tué récemment près de Syrte.
Interrogé sur la situation en Libye, Beji Caïd Essebsi a estimé qu'une intervention militaire dans ce pays "ne ferait qu'aggraver" le problème. "Ce qu'il faut en Libye, c'est qu'on arrive à un dialogue (...) pour éviter que la Libye ne se divise en deux. Ce serait alors quelque chose de beaucoup plus catastrophique", a-t-il dit.
(avec Gregory Blachier à Paris, Eric Faye, Jean-Philippe Lefief et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)