Le groupe de luxe LVMH ne revendra pas ses parts discrètement acquises dans Hermès, comme le demandent ses héritiers: au contraire, son PDG Bernard Arnault, qui réitère ses intentions "pacifiques", déplore l'hostilité de la maison à son égard.
Pas un observateur du secteur n'en doutait mais Bernard Arnault l'a confirmé: LVMH est "entré au capital d'Hermès pour le long terme" et il n'a pas l'intention de vendre les 17,07% qu'il a acquis en toute confidentialité "depuis plusieurs années", dit-il dans un entretien jeudi au Figaro.
Il oppose ainsi une fin de non-recevoir à une demande des dirigeants d'Hermès, déjà dans le Figaro, de se retirer du capital du groupe de luxe.
Et surtout, il contre-attaque en inversant les accusations d'hostilité. Son opération "est tout à fait pacifique", répète-t-il, même si les analystes convergent pour estimer qu'elle vise, à plus ou moins long terme, à en prendre le contrôle.
Pour Xavier de Villepion, gérant chez Global Equities, Bernard Arnault va "prendre son temps" mais "ira au bout" de son action. Il ne devrait "pas déclencher d'hostilités" au risque de se retrouver face à l'animosité d'une famille unie dans l'adversité, mais attendre son heure.
"Ce qui est hostile", poursuit Bernard Arnault dans le Figaro, c'est de lui demander "par voie de presse de vendre (ses) actions".
Il note d'ailleurs que la présence de LVMH au capital d'Hermès n'a pas toujours été source d'inquiétude puisque "dans les années 80, les actionnaires d'Hermès avaient vendu plus de 10% du capital à (son) groupe", "pour assurer un peu de liquidités à la famille", présume-t-il.
"Notre présence au capital n'avait posé aucun problème", souligne-t-il. Cette participation avait été "conservée pendant plusieurs années" puis revendue "pour faciliter l'introduction en Bourse" d'Hermès, explique encore M. Arnault.
Sollicitée, la maison Hermès n'avait pas répondu à l'AFP jeudi en milieu d'après-midi.
A la question de savoir s'il est prêt à revendre ses parts, comme le lui demande Hermès, il répond clairement: "Non. En outre je ne vois pas en quoi le gérant d'une société cotée en Bourse (Patrick Thomas, gérant d'Hermès, NDLR) est qualifié pour demander à un actionnaire de vendre ses parts".
"Il est au contraire censé défendre les intérêts de tous les actionnaires", poursuit le PDG de LVMH, présentant son arrivée comme "probablement le meilleur moyen de préserver l'ancrage français et le caractère familial de cette entreprise".
Mercredi, le président du conseil de gérance, Bertrand Puech, descendant du fondateur à la cinquième génération, et le gérant d'Hermès, Patrick Thomas avaient appelé le patron de LVMH à se retirer du capital de la maison, moins de deux semaines après son entrée fracassante.
Sur la technique employée, Bernard Arnault est peu disert. "Nous avons respecté intégralement la réglementation", insiste-t-il.
Pourquoi via des filiales aux Etats-Unis, au Luxembourg et au Panama ? "Pour des raisons historiques", se borne-t-il a répondre. Quand avez vous commencé ? "Il y a plusieurs années".
L'Autorité des marchés financiers vérifie actuellement que la réglementation a bien été respectée, notamment celle qui oblige tout actionnaire à lui déclarer dès qu'il franchit 5% du capital d'une société cotée.
Mais LVMH a utilisé des contrats d'option particuliers ("equity swaps") qui ne sont pas légalement compris dans les franchissements de seuil.
A 16H00, le titre Hermès gagnait 0,10% à 158 euros et LVMH progressait de 3,23% à 119,75 euros dans un marché en hausse de 2,23%.