Deux ans après la promulgation de la loi controversée symbolisant le "travailler plus pour gagner plus", les heures supplémentaires exonérées marquent le pas depuis début 2009, en particulier dans l'industrie, sur fond de crise, et continuent de faire débat.
Lors des six premiers mois, le volume d'heures supplémentaires déclarées a atteint 331,2 millions, un recul supérieur de 7% comparé à la même période de 2008. Au deuxième trimestre, le rythme de baisse sur douze mois a été plus que doublé comparé à celui du premier trimestre, selon des données publiées jeudi.
Pour 2009, le gouvernement table sur environ 750 millions d'heures supplémentaires, comme en 2008.
Au deuxième trimestre, "le nombre d’heures supplémentaires est en recul dans la plupart des secteurs d’activité", a noté l'Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (banque de la Sécu), précisant que "l’industrie est plus touchée que le BTP et le tertiaire, notamment dans la métallurgie et l’automobile".
Des heures supplémentaires ont parfois coexisté ces derniers mois avec des mesures de chômage partiel, également soutenues financièrement par l'Etat, même dans des secteurs très touchés par la crise comme l'automobile.
Mesure phare illustrant le slogan de campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy "Travailler plus pour gagner plus", le dispositif de soutien aux heures supplémentaires par des exonérations sociales et fiscales a été lancé par la loi "en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat" alors que la France affichait encore un rythme de créations d'emplois inédit depuis 2000.
Après une hausse régulière depuis l'automne 2007, l'inflexion des heures supplémentaires traduit, avec un décalage, la dégradation du marché de l'emploi sous l'effet de la crise économique entamée à l'automne 2008.
Autre élément d'explication: les mois suivant l'application de la loi, les entreprises avaient mieux déclaré les heures sup', un blanchiment de travail au noir qui a gonflé la hausse. Près de deux ans après, cette "modification des comportements déclaratifs" joue moins sur les chiffres.
Entre 3 et 4 salariés sur 10 avaient perçu une prime d'heures supplémentaires en 2006, année précédant l'élection de Nicolas Sarkozy et l'instauration d'un dispositif visant à développer les heures supplémentaires.
Opposés à la mesure dès l'origine, les syndicats, l'opposition et des économistes ont redoublé de critiques avec la flambée du chômage, considérant que l'argent serait mieux employé dans des aides aux demandeurs d'emploi.
Ils ont appelé à abroger les exonérations sur les heures supplémentaires, jugeant qu'elles coûtent plus à l'Etat qu'elles n'apportent aux salariés et qu'elles font travailler plus des salariés quand d'autres perdent leur emploi.
Le coût total de cette mesure pour le budget de l'Etat (exonération de cotisations sociales et défiscalisation) avait été évalué à 4,4 milliards d'euros par an en régime de croisière.
En 2008, première année pleine du dispositif, les seules exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires ont représenté un manque à gagner d'environ 2,8 milliards d'euros pour la Sécurité sociale, compensé par l'Etat.
Fin juin 2009, le manque à gagner en cotisations sociales atteignait 1,33 milliard d'euros, en repli de plus de 2% sur un an.
Pas question d'abroger les exonérations d'heures supplémentaires, a martelé le gouvernement, expliquant qu'elles étaient un moyen de distribuer du pouvoir d'achat notamment aux ouvriers, mais aussi "un élément de flexibilité sur le temps de travail limitant l’ajustement sur l’emploi en période de crise".