Les principales banques centrales mondiales ont volé jeudi au secours de la zone euro et de son secteur bancaire, dans une action concertée qui rappelle le pic de la crise financière en 2008 et illustre l'inquiétude grandissante suscitée par la situation de l'Union monétaire.
Peu avant la clôture des places boursières européennes, les banquiers centraux des pays les plus riches se sont mobilisés pour éviter le tarissement des liquidités des banques en dollars.
Elle a impliqué la Banque centrale européenne (BCE), la Réserve fédérale des Etats-Unis, la Banque d'Angleterre, la Banque du Japon et la Banque nationale suisse, a annoncé la BCE dans un communiqué.
Les instituts bancaires de la zone euro éprouvent en effet des difficultés croissantes à s'alimenter en billet vert sur le marché interbancaire, car les banques américaines rechignent à leur prêter des fonds en raison des interrogations pesant sur la santé du secteur dans la zone euro.
Les banques centrales vont mettre à disposition des banques des liquidités en dollars dans le cadre d'opérations sur trois mois, afin de couvrir les besoins au-delà de la fin d'année. Cet approvisionnement est essentiel pour que les banques européennes puissent continuer à effectuer des prêts aux entreprises et aux ménages.
Cette opération a soulagé les marchés jeudi, de même que le soutien affiché par la France et l'Allemagne à la Grèce et à son maintien dans la zone euro.
Les marchés ont clôturé dans l'euphorie: la Bourse de Paris a gagné 3,27%, Londres 2,11% et Francfort 3,15% tandis que Milan progressait de 3,56% et Madrid de 3,63%. A New York, le Dow Jones a terminé en hausse pour une quatrième séance d'affilée, prenant 1,66%.
Les principales banques européennes ont vu leur cours s'envoler en Bourse: à Paris, BNP Paribas a bondi de 13,38%, suivie de Crédit Agricole (+5,89%) et Société Générale (+5,44%). A Francfort, Commerzbank a gagné 7,81% et Deutsche Bank 5,82%.
L'annonce est intervenue juste avant le début dans la soirée d'une réunion des ministres européens des Finances à Wroclaw en Pologne (sud-ouest) sur la Grèce. Elle doit durer 48 heures et en principe permettre de surmonter les obstacles restants à la mise en oeuvre du second plan d'aide à Athènes d'un montant de près de 160 milliards d'euros, décidé le 21 juillet.
La mise en place de ce programme de prêts traîne en longueur car certains pays rechignent à aider une nouvelle fois Athènes.
Aucun accord ne semblait en vue jeudi soir sur ce point délicat, qui sème la zizanie au sein de la zone euro, certains pays souhaitant obtenir ce type de traitement de faveur.
De source européenne, ce sujet risque d'être une pierre d'achoppement lors des discussions en Pologne. "Nous y travaillons", a indiqué jeudi soir Olli Rehn, le commissaire européen aux Affaires économiques.
Les ministres européens des Finances pourraient aussi se prononcer sur un accord de principe pour durcir le Pacte de stabilité et la discipline budgétaire commune dans l'Union, qui a été conclu jeudi matin au Parlement européen à Strasbourg.
La soirée de jeudi s'est ouverte par un dîner, en présence notamment du président de la Banque centrale européenne Jean-Claude Trichet, avant que les responsables économiques des pays de la zone euro puis de l'ensemble des 27 n'entrent dans le vif du sujet dès vendredi matin.
Fait exceptionnel: le secrétaire américain au Trésor, Timothy Geithner, a été invité par la présidence polonaise de l'UE à participer à certains des travaux.
M. Geithner a estimé mercredi que les Européens allaient "devoir agir plus vite" et qu'ils devraient injecter davantage de fonds pour éviter une crise majeure.
La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) Christine Lagarde, pour qui les économies occidentales sont plongées dans un "cercle vicieux", a appelé le monde à "faire front commun" pour parer au risque de récession aux Etats-Unis et en Europe, estimant que "personne" ne serait épargné si ces économies rechutaient.
La zone euro devrait éviter de sombrer dans la récession, mais les prévisions de croissance au second semestre doivent être revues à la baisse, a prévenu la Commission européenne, qui a toutefois maintenu son estimation d'une hausse de PIB de 1,6% en zone euro pour l'ensemble de l'année.
Le Premier ministre grec Georges Papandréou a de son côté réaffirmé la "détermination absolue" de la Grèce à respecter ses engagements.