Un jury fédéral a donné raison au groupe internet Google dans le procès l'opposant au groupe Oracle, propriétaire du langage de programmation Java, en déterminant qu'il ne s'était pas rendu coupable de violation de brevets.
Dix jurés réunis par un tribunal fédéral à San Francisco (Californie, ouest) ont conclu à l'unanimité qu'Oracle n'avait pas prouvé que le système d'exploitation Android de Google, destiné aux téléphones et tablettes, représentait une violation des brevets de Java.
"Nous sommes reconnaissants du verdict du jury", a réagi l'avocat de Google Robert Van Nest en quittant la salle d'audience.
Le principal avocat d'Oracle n'a fait aucun commentaire.
Oracle, qui a acquis en janvier 2010 Sun Microsystems, l'inventeur du langage Java, demandait à Google d'arrêter d'utiliser cette technologie et lui réclamait le paiement de dommages et intérêts, considérant que "la +base+ du système d'exploitation Android consist(ait) en des applications Java".
Mais selon Google, le groupe Sun Microsystems, du temps où il était indépendant, avait déclaré que Java serait en code ouvert, avait permis à tous les développeurs de l'utiliser et avait commencé à en publier le code-source en 2006-2007.
Plusieurs experts sollicités par l'AFP ont souligné qu'il s'agissait d'une grande victoire pour Google: le groupe "devrait mettre des confettis sur son moteur de recherche", a commenté un avocat washingtonien spécialiste des brevets, Robert Stoll.
"Il semble que Google ait encore esquivé une très grave remise en cause de l'un de ses produits, liée à la propriété intellectuelle, un coup gagnant de plus après des contentieux sur son moteur de recherche, son moteur de recherches d'images et d'autres produits", a précisé le professeur de droit Brian Love, à l'université Stanford.
"C'est pratiquement un désastre pour Oracle", a ajouté M. Love, notant que même s'il fait appel, Oracle ne pourrait rien obtenir avant plus d'un an au moins.
Les jurés ont délibéré pendant près de sept jours pour arriver à ce verdict.
Au début du mois, dans le cadre de la première partie de ce procès, ils avaient livré un verdict mitigé sur la question de savoir si Google avait empiété sur les droits d'auteur d'Oracle: ils avaient estimé que Google s'était certes rendu coupable d'infraction aux droits d'auteur, mais qu'il avait eu des raisons de penser qu'il était dans son droit.
Ils n'avaient pas pu se mettre d'accord pour savoir si Google avait fait un "usage loyal" d'un partie du programme Java, qui appartient à Oracle depuis 2010.
En cas d'"usage loyal" avéré, Oracle n'aurait droit à aucun dédommagement.
Dans le cas contraire, s'agissant seulement d'une infraction sur les droits d'auteur et non de violation d'un brevet, la législation prévoit un dédommagement modeste, "qui ne suffira peut-être pas à couvrir les frais de deux jours de travail des avocats d'Oracle", selon M. Love.
Le juge William Alsup chargé du dossier a renvoyé les jurés chez eux plutôt que d'aborder dans la foulée une phase du procès qui aurait été consacrée aux dédommagements éventuels.
Google a déjà réclamé l'annulation de la partie du procès portant sur les droits d'auteur.
De son côté, le juge Alsup s'est réservé le droit de déterminer si les interfaces de programmation au centre de la première phase du procès pouvaient même être soumises à droits d'auteur. Il pourrait trancher cette question dès la semaine prochaine.
Ce procès a été extrêmement suivi dans la Silicon Valley, où le recours à la législation sur les droits d'auteur pour des interfaces de programmation était jugé inhabituel.
"Les deux parties ont gaspillé d'énormes ressources qui auraient pu être consacrées à l'innovation. C'est un triste message sur le point où on en est arrivé dans les poursuites liées à la propriété intellectuelle", a regretté Julie Samuels, de l'association Electronic Frontier Foundation.