Air Caraïbes, Air France et Corsair International doutent de la capacité de XL Airways de s'implanter durablement dans le paysage des compagnies desservant les Antilles françaises mais "cette aventure" va fragiliser un secteur déjà mal en point.
La semaine dernière, XL Airways France a annoncé qu'elle proposerait, à partir de décembre, des vols à bas coûts vers la Guadeloupe et la Martinique depuis l'aéroport parisien de Roissy, à raison de trois rotations hebdomadaires en Airbus A330, avec un prix d'appel à 399 euros TTC l'aller-retour.
"L'histoire nous a démontré que ce modèle ne fonctionne pas", assène Pascal de Izaguirre, PDG de Corsair. "Nous avons eu l'exemple de nombreuses compagnies qui avaient choisi de desservir les Antilles à des tarifs extrêmement bas. Elles ont très vite disparu. Ce modèle n'est absolument pas pérenne", estime-t-il.
Il y voit "une attitude suicidaire et désespérée pour remplir les avions" d'une compagnie qui "est toujours à vendre".
Son homologue d'Air Caraïbes, Marc Rochet, qui a une longue expérience des Antilles, renchérit: "il n'y a jamais eu sur les Antilles et La Réunion de régime stable à quatre opérateurs, cela a duré un an".
"On est probablement sur ce schéma mais c'est l'histoire qui le dira", dit-il rappelant qu'Air Bourbon avait déposé le bilan en 2003 l'année-même où elle avait tenté des vols vers La Réunion.
La directrice des lignes Caraïbes et Océan Indien d'Air France, Chantal de Grandcourt, se montre tout aussi sceptique.
"Annoncer qu'ils seront 30% moins cher que les autres, cela signifie que les autres coûts sont 60% moins cher. Je doute qu'ils puissent honorer cette promesse aux clients tout en étant rentables", résume-t-elle.
XL pas la moins chère, Air France pas la plus chère
Les dirigeants y voient donc un pur effet d'annonce qui ne concernera qu'une infirme partie des billets vendus.
De fait, un billet Paris Pointe-à-Pitre, réservé mardi soir, avec un aller le 14 décembre et un retour le 28 décembre, ressort à 704 euros pour Air Caraïbes, 720 euros pour Air France, 758 euros pour XL et 848 euros pour Corsair, selon une recherche de l'AFP.
Et, XL Airways ne va pas nécessairement dynamiser le trafic.
"Je ne suis pas sûre que XL trouve un élan de nouveaux clients fabuleux. Nous avons les mêmes clients. (...) cela va donc forcément avoir un impact sur toutes les compagnies", prédit ainsi Mme de Grandcourt.
La venue de XL Airways coïncide enfin avec une surcapacité tangible depuis plusieurs mois.
Air France, Air Caraïbes et Corsair ont même dû supprimer des rotations au printemps, pour éviter de faire voler des avions "à vide".
A défaut de pouvoir baisser encore leurs tarifs, les trois compagnies mettent en avant le service.
"Corsair est présente sur les Antilles depuis 20 ans (...) Nous n'avons jamais arrêté de les desservir même pendant les coups durs", insiste M. de Izaguirre.
"Les Antillais ont le droit au confort et à autre chose qu'un produit au rabais. Notre conception du trafic aérien n'est pas d'offrir des billets à prix cassés avec des passagers voyageant les genoux dans le menton", conclut-il.
"XL Airways France revient sur les fondamentaux de l'impératif historique des liaisons Antilles avec la métropole: l'accessibilité au plus grand nombre", se défend son PDG, Laurent Magnin.
En contrepartie, une seule classe, économique, certaines prestations à bord comme les en-cas payants et la franchise pour les bagages moins généreuse que sur d'autres compagnies.